Le poil à gratter… 
Lettre d’information de Cynorrhodon – FALDAC  
www.cynorrhodon.org  


N° 26 – novembre 2014  

  ISSN 2264-0363
 

macparis 2014
Espace Champerret – du 27 au 30 novembre 2014
Notices de présentation des 134 exposants
(Rédigées par Louis Doucet)



4 installateurs invités par mac2000

Les dessins de Maya Benkelaya mettent en scène le corps humain, mais en ne le faisant jamais figurer explicitement, procédant plutôt par allusions ou par métaphores. Elle use ainsi de subterfuges transposant l’anatomie dans des formes improbables, absurdes ou inconfortables, mais toujours identifiables. Ce refus de la représentation directe n’exclut pas une forme de voluptueuse sensualité.
Plus encore qu’au corps, c’est à sa frontière avec le monde extérieur, à la peau, que l’artiste porte son attention la plus passionnée. Le latex est un de ses matériaux de prédilection. Il peut se répandre au sol, comme une flaque délimitée par une fragile bordure, pendre au mur en lanières sages ou déchiquetées, constituer des torsades en forme de tresses. Il est souvent accompagné de boutons pression pour souligner le fait qu’il s’agit bien d’un matériau qui a pour vocation de se refermer, de mouler pour mieux envelopper. Mais cet enfermement suggéré n’a rien d’un emprisonnement. Au contraire, ses œuvres délivrent l’imagination et la conscience qui, libérées de toute représentation trop explicite, peuvent s’égarer dans des chemins non balisés qui n’ont rien de contraint ou de prédéfini. On pense à l’expression « Esclave de corps, d’esprit libre. » de Sophocle. Et c’est bien de cela qu’il est question. La peau, telle une mue, est restée sur place. Son habitant s’est échappé, a pris une liberté que le spectateur est libre d’imaginer comme il l’entend.

Le travail de Benoît Carpentier prend naissance dans des grands dessins géométriques, en forme d’épures, qu’il découpe, lacère et ré-assemble pour produire des formes à la fois vagues et allusives, équivoques mais très présentes. Il utilise aussi des tissus enduits de gesso, stratifiés, découpés, déformés et complétés de menus objets, eux aussi en tissus enduits de gesso, souvent peints comme des fanions, pour produire des sortes de paysages mentaux improbables mais tout empreints de poésie. Ces paysages sont parfois prolongés par des lignes géométriques, au crayon, inscrites à même le mur.
Les œuvres résultantes, apparemment fragiles dans leur complexité, procèdent simultanément du dessin, de la peinture et de la sculpture. Partant d’une simple ligne, elles jouent sur les notions de vide et de plein qu’elles tentent de subvertir pour proposer une nouvelle lecture de l’espace, dans laquelle le spectateur hésite entre une vision à deux ou à trois dimensions.
Ce patient travail n’exclut pas l’improvisation, l’indétermination et le hasard, tant dans le processus de construction des œuvres que dans les aléas de leur observation qu’une infime variation d’angle ou d’éclairage peut rendre toutes autres. Il y est aussi question de multiples oppositions dialectiques, de tension, de gravité et de légèreté, de droite et de courbe, d’épaisseur et de platitude, de matériel et d’immatériel, d’ombres projetées et de traits à la mine de plomb, de résistance des matériaux perçus comme fragiles, de l’opposition entre le blanc et les couleurs primaires, du statut de l’objet, de son (in)utilité, de construction et de déconstruction, d’évidement, de réduction et de transformation…

Eskrokar s’est fixé pour objectif de dynamiter une certaine bien-pensance du monde de l’art contemporain, de ridiculiser ses stéréotypes et de démasquer ses impostures. Dans une approche souvent minimaliste, il nous présente des propositions qui, en première lecture, semblent appartenir à ce monde qu’il veut subvertir de l’intérieur. Mais, très vite, l’observateur se rend compte que l’artiste met en cause, non sans une ironie cinglante, le faux qui régit l’univers factice de l’art de notre temps : fausses esthétiques, fausses valeurs marchandes, faux regards critiques...
Sa démarche s’inscrit dans la descendance de Duchamp mais prend le contrepied d’un grand nombre d’artistes à la mode qui ont sacralisé Marchand du sel avec un sérieux pompeux et pesant qui le momifie dans une sorte d’académisme de la subversion.
Eskrokar, dans un grand éclat de rire, met le pied dans la fourmilière, prenant un grand plaisir à provoquer la débandade du troupeau de ces modernes émules des moutons de Panurge.

Christian Lefèvre pratique avec une égale aisance le dessin, la photographie, la sculpture et l’installation. Il privilégie la récupération, le recyclage ou le détournement de matériaux. Il nous propose ici des œuvres appartenant à la plus récente de ses séries de travaux en volume, intitulée Les Mous, réalisée à partir de toiles de mousse colorées. Sa technique est résolument contemporaine, mais les œuvres résultantes s’inscrivent dans la grande tradition plastique de la sculpture du XXe siècle.
Christian Lefèvre nous présente sa propre relecture du phénomène nature, dans une démarche synthétique de reconstruction, quasiment ex nihilo, d’une nature selon sa vision. Cependant, quel que soit le cheminement sous-jacent, ses œuvres prennent pleinement leur place dans la longue histoire du paysage.

10 vidéastes invités par l’ADAGP

Marguerite Artful crée des volumes au statut incertain, tour à tour œuvres d’art, éléments de décor ou accessoires de mises en scène improbables. À ces objets simples elle confère une charge symbolique que la prise de vue révèle et magnifie en leur donnant du sens. Un sens qui n’a rien d’unique car chaque spectateur est invité à y projeter ses propres expériences personnelles.
Son mode d’expression combine la répétition de gestes simples traités comme autant de rituels au quotidien, une atmosphère profondément sensuelle qui sonde les tréfonds de l’intime, un fétichisme du banal, l’exaltation de petits riens, la réitération, jusqu’au vertige, de postures et de scénarios anodins…
Tout ceci résulte en un univers où les frontières entre le rêve et la réalité deviennent poreuses, incertaines.

Michaël d’Auzon est chorégraphe et vidéaste.
Formé à la danse classique à Nice et à La Rochelle, il danse au sein du Jeune Ballet de France, du Ballet du Rhin et du Ballet de Nancy, où il signe ses premières chorégraphies dès 1995. Invité dans plusieurs compagnies en France et à l’étranger, et directeur artistique de la Compagnie l’Instant, qu’il fonde à Nancy en 2000, il effectue de nombreuses créations.
Sa vidéo Morphismes résulte d’une collaboration avec le designer sonore Lorenzo Brusci, dans le cadre d’une Bourse de Résidence à Berlin du Conseil Général de Moselle. Les corps des danseurs, rendus quasiment abstraits par la prise de vue et les éclairages, y deviennent flammes, feux-follets, objets troublants et oniriques.

Les créations vidéographiques de Brno Del Zou procèdent de la même démarche de morcèlement et de reconstruction que ses œuvres plastiques. À la troisième dimension de ses photosculptures – la profondeur – se substitue celle du temps. Les couleurs disparaissent au profit de camaïeux de gris. Les pièces d’un puzzle corporel se déplacent dans un mouvement kaléidoscopique proliférant, créant un foisonnement sensuel potentiellement illimité auquel seul l’arbitraire de l’artiste met un terme.
Tout comme dans ses œuvres en trois dimensions, la femme et ses appâts y sont blasonnés, donnant une dimension très contemporaine aux poèmes de Clément Marot ou Maurice Scève dédiés au corps féminin.

Le travail de Sonia Burel relève, apparemment, de l’abstraction géométrique, en ce qu’il produit des constructions abstraites fondées sur un équilibre de formes simples et de couleurs. Mais, le plus souvent, plutôt que de la transposition de son imaginaire intérieur, il s’agit de représentations abstraites d’une réalité qui a convoqué son attention, son regard.
Dans sa série de tableaux sur les lumières de la ville, l’artiste retranscrit les illuminations nocturnes. Les lumières constituent l’objet principal de la composition et sont représentées par des carrés de couleurs vives, transposant fidèlement la réalité initiale. Ils se détachent du fond et scintillent, créant un rythme dans l’architecture géométrique du tableau. Cette opération peut être interprétée comme une déconstruction du réel, comme une pixellisation désordonnée du sujet.
Sa vidéo Canal Saint-Martin procède de cette démarche en y ajoutant une quatrième dimension, celle du temps.

Alphonsine David est une artiste complète, abordant avec un égal bonheur tous les médias : peintures, dessins, sculptures, photographies, installations, performances, vidéos… Ses travaux font souvent référence au corps humain et, plus précisément, à son écorce externe, à sa peau.
Dans ses vidéos, elle n’hésite pas à se mettre elle-même en scène, dans des montages qui fusionnent des images cinématographiques et des animations de dessins à la mine de plomb ou à l’encre. Ses séquences d’images entraînent le spectateur dans une forme de délire étourdissant où, perdant ses références traditionnelles, il devient sujet à des hallucinations visuelles, à des vertiges qui lui font perdre le sens de l’équilibre et renoncer à toute velléité de positionnement par rapport à ses repères familiers.

Dans la vidéo sélectionnée, Laïna Hadengue plasticienne multimédia articule sa scénographie autour du vécu ambivalent et de la réorganisation intime de de la grossesse. Le climat en est onirique et hypnotique, immergeant le regardeur-voyeur dans un univers métaphorique, de lumières et de pénombres, de mutations subtiles des couleurs, dans lequel l’enfant à naître, bien qu’invisible, tient la place principale.
Selon les propos de l’artiste, « le spectateur est invité à s’interroger sur sa propre histoire fœtale, portée par les métamorphoses tourmentées de la gestation et par la beauté incandescente de l’attachement naissant jusqu’à la projection imaginaire de la nécessaire et irréversible séparation. […] nous voici renvoyés du songe à la vie, questionnés indéfiniment. D’où venons-nous ? Quelle mère nous a porté ? »

Adèle Javaux est une toute jeune artiste, encore élève à l’École des Beaux-Arts de Paris, après une formation aux métiers de la mode et du vêtement.
Sa vidéo Tunnel témoigne d’une étonnante et précoce maîtrise de tous les paramètres techniques de la vidéo. Il en résulte une œuvre surprenante et fascinante, singulière et troublante qui augure d’un riche talent qui nous étonnera.

Pascal Labrouillère, musicien, photographe et vidéaste, formé à l’informatique et à l’audiovisuel, appartient à cette génération d’artistes qui ont découvert la création assistée par ordinateur et se sont d’emblée appropriés les techniques de l’expression multimédia.
De façon assez paradoxale, Pascal Labrouillère utilise comme matière première des images produites par des appareils désuets ou rudimentaires et des sonorités issues de jouets électroniques de première génération. Il les assemble, de façon plus ou moins aléatoire, faisant fi des anachronismes ou des incompatibilités techniques.
Cette touche délicatement rétro donne une dimension humaine, quelque peu nostalgique, aux histoires simplettes ou délicieusement absurdes qu’il nous raconte.

Les œuvres de Richard Negre proposent une lecture autre de l’espace tridimensionnel, une lecture qui contredit les postulats habituels de la physique et de l’entendement, mais qui s’appuie sur ceux-ci ainsi que sur les lois de la perception traditionnelle pour les pervertir, développant une approche illusoire et allusive de la quatrième dimension.
Il y a aussi, dans les vidéos de Richard Negre, une incomplétude définitive, une fragilité qui se mue en une sorte de pudeur, une solidité de la construction que contrarient et contestent les moyens mis en œuvre pour la manifester, une irrésolution-tension existentielle entre mouvement et solide ancrage, entre énonciation clairement affirmée et ambiguïtés irréconciliables.
Richard Negre suscite, chez l’observateur de ses travaux, un sentiment de manque, une forme de frustration qui le pousse à aller plus loin, à s’interroger sur le statut de la création artistique, à la perméabilité des paramètres espace, temps et lumière.

Le travail vidéographique d’Anthony Rousseau fait appel au détournement et au recyclage d’éléments issus des mass-médias et, plus spécifiquement, d’Internet, qu’il mêle à des références à la littérature, à l’histoire de l’art et au cinéma expérimental. Hybridation, mixage et collage sont ses démarches de prédilection.
L’ensemble de ses travaux se concrétise par des recherches et expérimentations autour de l’image, fixe ou en mouvement, et la matière sonore. Ils prennent la forme de vidéos, de photographies, de bandes sonores, de performances et d’installations interactives.
Le fil conducteur commun à ces diverses formes de création est la volonté d’une relecture critique, poétique et esthétique d’un réel préexistant.
Sa vidéo My last round recourt à la métaphore d’un combat de boxe pour évoquer la lutte pour la vie.

120 plasticiens

Initialement photographe, Alione a été saisi par la peinture en découvrant les mégalopoles américaines et européennes.
Ses toiles restituent la grandeur et la violence latente des cités, empruntant simultanément à l’art brut et au street-art, tout en reconnaissant sa dette envers le cubisme de Picasso et les couleurs arbitraires de Matisse et de la tradition fauve.
Alione ne prend pas la pose. Il ne se soucie pas de développer un propos à portée universelle. Son engagement est essentiellement à portée personnelle. Il veut seulement traduire son humeur ludique, ses crises de rage, ses enthousiasmes et ses déceptions… À nous de les partager ou non…
Une des formes de prédilection de son humeur folâtre est la déconstruction – voire la démolition – des icônes de la modernité. À cet égard, sa relecture du Déjeuner sur l’herbe de Manet est particulièrement décapante.

Les processus mis en œuvre par le Suisse Jean-Jacques Allemann ont tout de la rigueur de la mécanique horlogère.
Il commence par réaliser des petites figurines en terre ou en plâtre, puis il les photographie, les détoure et les travaille sur ordinateur, y ajoute des commentaires humoreux et les imprime sur textile ou sur aluminium, avec des fonds de couleurs saturées uniformes. Quelques touches de peinture acrylique ou des graffitis peuvent compléter la composition.
Ses personnages, ridicules mais sympathiques, sont touchants, attachants. Le spectateur y reconnaîtra peut-être les mimiques de quelqu’un de sa connaissance. Si ce n’est pas le cas, il tentera de démêler le constat factuel de la fiction, le vivant du minéral, l’humain de l’animal, le vrai du faux, l’important du futile, l’universel de l’individuel…

Frédéric Amblard nous propose des paysages et des scènes de genre, drolatiques ou cruelles, oniriques ou critiques. Il les traite avec des couleurs vives et des distorsions des formes qui évoquent l’expressionnisme sans, cependant, en porter la charge émotionnelle ni les inclinations pessimistes.
Ses paysages sont inspirés de ceux du Lot, département qui lui est cher. Sa vision du monde et de ses occupants, est quelque peu distanciée, comme le serait un entomologiste de ses sujets d’observation, ce qui n’exclut pas, à travers le voile d’une ironie parfois caustique, l’expression d’une véritable sympathie pour le genre humain.

Derrière le pseudonyme Yola Aurouze se dissimule une très jeune artiste formée à l’École des Beaux-Arts de Saint-Étienne.
Yola prend comme matériau de base des pages de magazines illustrés, des dépliants publicitaires ou des livres qu’elle déchiquette puis comprime pour créer des blocs en forme de briquettes. Elle solidifie et fige ensuite ces parallélépipèdes fragiles dans de la résine transparente.
Les briquettes juxtaposés sur plusieurs registres, à touche-touche, forment des parois semi opaques, richement colorées, potentiellement illimitées dans leur occupation de l’espace. Leur nature réelle échappe au spectateur en première analyse : vitrail ou claustra, réalité ou illusion, richesse ou pauvreté du matériau, solidité ou fragilité, combinatoire figée ou évolutive ? Autant de question auxquelles l’artiste se garde bien de formuler des réponses, encourageant le spectateur à accepter cette ambiguïté génératrice d’infinies potentialités dont aucune ne prétend à la vérité absolue.

Les travaux de Caroline Baup associent le néon des slogans publicitaires et une peinture construite, radicale, épurée, souvent réduite à des juxtapositions de bandes colorées.
Les inscriptions en néon ne sont pas directement empruntées aux enseignes lumineuses urbaines. Certes, l’artiste y puise des fragments de formes ou de mots, des signes, des onomatopées, mais elle les simplifie et les transpose dans un environnement autre. Elles deviennent alors des symboles à caractère universel.
Dans ce processus, les images lumineuses ne s’imposent plus pour vanter tel ou tel produit ou service déshumanisé, mais se mettent au service d’un projet de déconstruction radicale, non dénué d’un certain humour. Les rôles s’inversent, la publicité se mettant au service de l’humain.
Les compositions de Caroline Baup ouvrent ainsi un éventail d’interprétations individuelles, à l’exact opposé de la volonté de conditionnement comportemental des enseignes lumineuses.

Berg, peintre, s’inscrit à contre-courant de la mode et de ses diktats esthétiques. Elle revendique le classicisme tant dans sa facture que dans les sujets qu’elle aborde. Elle renoue ainsi avec une tradition décriée et rejetée par la révolution moderniste pour la réactualiser tout en y intégrant les acquis du XXe siècle.
Sa technique recourt à des glacis, à des effets d’ombre et de lumière, renouant avec les secrets des ateliers des peintres flamands de la Renaissance et du Siècle d’Or.
Elle pratique avec un même bonheur le paysage, le portrait et la nature morte. Ses peintures rendent une âme aux sujets qu’elle traite, leur redonnent la parole. Une forme de rédemption plastique.

Longtemps comédienne, Sidonie Bergot a récemment abordé la sculpture, mettant entre parenthèse le jeu avec son propre corps pour explorer les potentialités de la matière inerte pour mettre en scène des personnages nés de son imaginaire.
Sa technique s’inspire de celle des accessoiristes – activité qu’elle pratique encore –, notamment du moulage de latex, pour produire des œuvres qui sont des hybrides entre sculpture et vêtement. Ses thématiques de prédilection sont la maternité, l’enfance, les rapports potentiellement conflictuels entre hommes et femmes… Elle s’appuie sur la notion théâtrale de personnage, archétype d’un modèle humain, avec une mise en exergue de ses traits essentiels, de ses contradictions, de ses forces et de ses faiblesses.
Dans une saisissante opération de transfert esthétique, Sidonie Bergot invite le spectateur à endosser une autre peau, à abolir temps et espace pour partager les émotions d’un personnage fictif en s’appropriant son intimité.

Plasticienne et artiste textile Laurence Bernard donne le primat à la matière, dans ses dimensions visuelles et tactiles.
Sa thématique est centrée sur le corps féminin, mis en scène dans des histoires dont le sens reste souvent obscur, sans que le titre ne puisse orienter le regardeur sans son processus d’élucidation. À lui de construire sa propre histoire, à l’intersection du propos de l’artiste et de sa propre expérience.
Dans ses œuvres, souvent présentées en diptyques de matériaux contrastés – draps usagés et papier kraft, par exemple –, il est souvent question d’adolescentes, du rouge des premières règles, de corps qui s’étreignent, se frottent et usent les draps… Les cadrages semblent parfois arbitraires, déstabilisant le spectateur pour ménager des surprises en lui faisant perdre tout sens de l’échelle.

Les œuvres de Débora Bertol résultent d’un dialogue permanent entre l’art, les sciences, la littérature et la philosophie.
En s’appropriant des gestes et des objets de la vie quotidienne, elle cherche à révéler ce qu’ils ont d’universel au-delà de leur apparente banalité.
Ses productions les plus récentes s’inscrivent dans deux séries : Propositions pour la représentation de l’infini et Mon ciel est différent du tien. Toutes deux nous interpellent sur le (non)sens de la vie et sur la relativité des perceptions humaines. Les notions d’échelle se dissolvent, par exemple quand le schéma d’une constellation, figuré par des épingles, se superpose à des images de chefs-d’œuvre du passé qui entretiennent un rapport, proche ou lointain, avec la symbolique du signe du zodiaque figurée.
Pour arriver à ses fins, Débora Bertol mobilise le dessin, la photographie, la vidéo, l’installation et le détournement ou recyclage d’images ou d’objets.

Docteur et enseignant en biochimie, Xavier Blondeau a souvent voyagé dans l’hémisphère sud : Nouvelle-Zélande, Australie, Antarctique… L’immensité des paysages qu’il y a découverts l’a poussé à réfléchir à la place de l’Homme dans son environnement. Il s’est alors tourné vers la photographie pour matérialiser ses interrogations.
Sa série Présence obscure traite des milieux urbains nocturnes. Ces images, sans existence humaine, appellent, comme en négatif, sa présence. « Rémanence d’un passé récent donnant aux choses une autre dimension. Comme si ces dernières avaient besoin d’une empreinte humaine pour exister. Ainsi, l’obscurité de la nuit ou la brume naissante du petit matin, sont des passeurs vers l’autre monde. Ils nous aident à mieux ressentir cette présence évanescente... », selon le propos de l’artiste. Le message de Xavier Blondeau est éminemment positif : même confronté à la complète déshumanisation qu’il a souvent lui-même programmée, l’humain reste central, de par son empreinte indélébile.

Joëlle Bonnamy travaille la terre qu’elle cuit et combine avec des tuyaux en métal ou en matière plastique pour composer d’étonnantes installations dans lesquelles la figure humaine est confrontée à la cruelle froideur de matériaux industriels.
De son Orgue de la misère, elle écrit : « Engloutis par la misère, les enfants du lointain se débattent en vain pour échapper à leur destin… Leurs silhouettes esquissées sur les tubes évoquent l’évanescence de leur histoire : sitôt nés, sitôt anéantis. Prisonniers des limbes, ils sont en suspension dans un univers sans espoir… Le rouge et le noir dominent comme le sang, la crasse et la déjection. Douze petits visages, comme arrachés à une terre noire et stérile, sont pétrifiés de douleur et d’effroi. Les tubes engloutisseurs peuvent être assimilés à la matrice d’une odieuse marâtre qui après les avoir vomis, re-dévorerait ses petits telle une mère indigne incapable de donner l’espoir d’une promesse pour une vie meilleure. Disposés en forme d’orgue, ils n’émettent aucun son sauf pour celui ou celle qui sait entendre comme une vague, le chant d’adieu muet des enfants de la Terre. »

Antoine Bono part d’images d’archive à caractère politique, social ou religieux. Il les détourne en les parasitant avec des motifs qui évoquent les formes cellulaires de la microbiologie ou les phosphènes des hallucinations visuelles. Le processus de parasitage, mis en œuvre avec un goutte-à-goutte de peintures de différentes viscosités, exploite la différence des temps d’évaporation de l’eau contenue dans chaque goutte. Il ne subsiste que des traces indécises qui évoquent des cellules en gestation.
Les images détournées disparaissent ainsi partiellement derrière ces superpositions de strates mémorielles qui en désactivent le sens anecdotique initial et en réactivent un autre, différent mais fragile, fugitif, comme en instance, à la limite du basculement vers un autre chose potentiellement dramatique.
À travers les différentes couches de ses riches palimpsestes, l’artiste déclare vouloir représenter la confrontation des forces antagonistes de vie et de mort qui sont à l’origine du développement de la vie sur Terre.

Les sculptures et les peintures d’Anne Bothuon ont en commun le fil, le tissu et l’aiguille.
Ses sculptures, un peu plus grande que nature, sont réalisées en toile de coton, en feutre et en ouate, sur des armatures de fer, le fil creusant, resserrant les chairs, mais aussi dessinant le contour d’une bouche, la forme d’un œil. Ses corps transpercés, ficelés, ligaturés, évoquent des écorchés dans un laboratoire d’anatomie. Ils sont figurés sans complaisance, obèses, callipyges, avec des bourrelets disgracieux, des seins tombants… Aux antipodes des canons d’une beauté que les médias veulent imposer.
Malgré les visages déformés, sujets à des rictus dont on ne sait s’ils sont de douleur ou des éclats de rire. Après une première sensation d’attraction-répulsion, ces êtres trop humains appellent la sympathie et dégagent un curieux mélange de douceur ironique et d’humour aigre.

Dans ses peintures, Kyung Bouhours peuple des espaces industriels désaffectés d’êtres et d’objets inattendus, surprenants, décalés, énigmatiques, désuets. Les détails y sont traités avec une remarquable précision, mais les rapports entre les différents éléments composant l’œuvre échappent à toute rationalité.
Bien plus que des histoires, dont le sens serait bien difficile à décrypter, l’artiste nous livre des métaphores, à lectures multiples, sur notre monde. On y reconnaît aussi la cruauté acerbe et l’étrangeté de l’univers des rêves, où les rapports de force entre objets inanimés, animaux et humains abandonnent toute réalité pour devenir fantasmatiques.
Les travaux de Kyung Bouhours nous rappellent donc avec force le propos de Vinci : « la pittura è cosa mentale. » Ils évoquent aussi « rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie» de Lautréamont.
Mais est-ce vraiment fortuit ?

Venu de la gravure et de la sculpture, passé par la peinture et le dessin, Hervé Bourdin développe, depuis quelques années, une technique qui mêle infographie, impression numérique et peinture acrylique.
Il nous livre des sortes de saynètes dans lesquelles des individus débonnaires et sympathiques, qui pourraient être nos voisins de palier ou des collègues de travail, se livrent à des activités qui mêlent, dans la même page, le grotesque et le tragique. Le regard jeté sur la société est acide, décapant, mais aussi rempli d’une profonde empathie pour les personnages mis en scène.
Par certains aspects, son graphisme évoque celui de la bande dessinée, domaine que l’artiste a investi en produisant des albums qui donnent à ses compositions une dimension narrative plus explicite.

Bruno Bressolin est peintre et graphiste, ce qui se voit dans son utilisation du blanc pour créer une tension entre les taches de couleurs, fluides et expressives, et le fond, statique et froid.
Chez lui, la figure humaine, avec ses pleins et ses vides qui s’opposent et se tendent, se comporte un peu comme des caractères typographiques sur une page. Cette volonté de simplification de la mise en page n’empêche pas son dessin d’être d’un réalisme confondant.
Ses mises en scène racontent des histoires, un peu à la façon d’un film, avec des acteurs qui observeraient des événements, probablement dramatiques, hors champ. L’humour y est omniprésent, échevelé et caustique, ce qui ne l’empêche pas de témoigner d’une réelle empathie pour ses personnages

Virgil Brill, photographe, nous présente une vision du monde globalement monochrome et floutée. Cette vision, presque toujours panoramique, est optimiste, faisant fi des horreurs et de la mesquinerie humaines pour mettre en avant la richesse de son étrange diversité.
Virgil Brill aime citer le Hamlet de Shakespeare : « Il y a plus de choses dans le ciel et sur la terre, Horatio, que n’en rêve votre philosophie. » Son propos, au premier degré, récuse donc toutes les considérations métaphysiques. Son seul objectif est de placer le spectateur aux frontières extrêmes de la réalité, au-delà desquelles le monde s’efface et se dissout dans une plage colorée.
À sa manière, Virgil Brill veut nous débarrasser de notre cécité devant les aspects les plus banals de notre environnement, ceux auxquels nous sommes tellement habitués que nous ne les voyons plus…

Brno Del Zou est photographe, plasticien, concepteur de logiciels, créateur d’installations vidéo et son interactives.
Ses portraits photographiques morcelés donnent à voir un visage sous différents angles et à différentes échelles, réactualisant ainsi le propos des premiers cubistes.
Dans ses installations interactives, le spectateur devient partie prenante à part entière du processus créateur. Par exemple, sa Chambre de Narcisse, équipée d’un appareil photographique relié à une série d’équipements informatiques permet au visiteur de réaliser son autoportrait en jouant avec tout un ensemble de miroirs montés sur des bras articulés. Le nombre de combinaisons et de positions est potentiellement infini.

Florence Brodard nous livre des grands dessins au pastel gras sur papier. Son univers est peuplé de créatures improbables dont les formes amiboïdes déjouent toute tentative de fixation d’une échelle. Microcosme ou macrocosme ?
Les images de Florence Brodard sont les reflets spéculaires d’un univers ancré dans l’inconscient. Ce sont des incarnations graphiques d’un lent processus d’émergence instinctive de formes probablement refoulées. Même si la démarche en est radicalement différente, profondément individuelle – individualiste, même – ces dessins peuvent faire penser aux cadavres exquis des surréalistes.
Le résultat, loin de toute grandiloquence ou de tout drame, est à la fois spontané et mûri, naïf et expressif, gai et dérangeant…

Ni totems ni monuments, ni sculptures ni machines, les étranges constructions de Christophe Brun, mêlant métal, lumière noire de néons et tirages photographiques argentiques, sont des sortes d’OVNI dans le monde de la création plastique contemporaine.
Les formes, anguleuses, à base de triangles, créées par pliage et soudage de tôles métalliques, bâtissent des sortes de demeures improbables, de conques protectrices. On peut y voir simultanément ou successivement, selon l’intensité lumineuse environnante, une métaphore du ventre maternel ou du sarcophage. Réflexion sur les origines et sur la fin… De l’individu et du monde… Le mécanique se mue ici en évocation poétique, en réflexion existentielle…
C’est probablement dans les dessins mécanistes de Picabia ou dans les Machines célibataires de Duchamp qu’il faut rechercher les racines de ce travail, mais Christophe Brun réactualise ces références historiques et les accommode à l’aune de la technologie contemporaine.

Butch est un artiste issu de la vague des graffeurs de la fin des années 1980. Après avoir animé les murs de la capitale, il s’est tourné vers la peinture d’atelier.
Ses peintures sur toile transcrivent son expérience lors de ses virées graffiti et nous en livre, en quelque sorte, l’envers du décor. On y découvre des façades d’immeubles à l’abandon, des ambiances de terrains vagues, des squats…
Ses images sont hautes en couleurs, couvertes de lettrages démesurés, peuplées de personnages issus de la bande dessinée ou de dessins animés, avec des coulures et des accidents. Dans ce travail qui relève de la technique du trompe-l’œil et de l’hyperréalisme, Butch nous permet de redécouvrir un univers urbain que nous côtoyons quotidiennement sans y prêter attention.
Il y a aussi, chez Butch, un processus de mise en abîme, créateur d’ambiguïtés qui ne peuvent laisser le spectateur indifférent.

Alexandre C. ne cesse de faire des allers et retours entre son chevalet et son ordinateur.
Ses œuvres résultent d’interactions complexes entre le numérique, qui permet des emprunts aux codes de l’art traditionnel et des déformations ou distorsions contrôlées, et la peinture sur toile conventionnelle. Chacune de ses compositions fait l’objet d’un long travail de préparation, matérialisé par des cahiers de volumineuses notes, inintelligibles pour des tiers mais indispensables à la genèse de l’œuvre.
L’artiste déclare : « Je peux juste dire que j’aborde le thème de la place de l’artiste et parfois de son imposture, notamment à cause du numérique qui permet beaucoup de choses… Également la représentation du corps, parfois livré en pâture aux cochons. On le ressent peut-être moins sur ces œuvres, mais la cohabitation / l’interpénétration est un thème récurrent dans mon travail. Je suis même parfois amené à penser qu’il en est le fondement… »

Émilie Chacon, photographe, déconstruit certains de nos mythes, codes et stéréotypes contemporains à travers la figure de la poupée Barbie.
Au-delà d’images empreintes de poésie nostalgique, baignées dans une atmosphère rétro, Émilie Chacon pose la question de notre capacité à distinguer la réalité de sa caricature, telle qu’elle nous est présentée par l’imaginaire collectif, les normes et les modèles que la société nous impose, souvent à notre insu. Elle s’attaque principalement aux mythes de la féminité, qu’elle dynamite de l’intérieur en poussant à l’extrême les images-écrans, stérilisantes, sclérosantes et mortifères, qui nous sont proposées à travers la célèbre poupée.
Frédéric Charles Baitinger résume l’essence de la démarche de l’artiste de façon percutante : « À quel moment l’image que nous nous faisons d’un être, d’un groupe humain, d’un phénomène culturel, acquiert une sorte d’autonomie fictive qui lui donne le droit de venir donner à la réalité un modèle auquel se conformer ? »

Le verre est le matériau de prédilection de Laure Chagnon. Elle le traite de façon non conventionnelle pour nous livrer de précieuses icônes, transparentes ou opaques, qui révèlent une sensibilité exacerbée.
La production d’œuvres en verre recourt à l’antique technique de la peinture sous verre, préservée jusqu’à nos jours par l’art populaire russe, qui, à l’opposé de la technique traditionnelle, impose de poser les sujets avant le fond.
Laure Chagnon montre un intérêt pour la biologie et pour les formes anatomiques, avec un fréquent recours à des rouges qui évoquent le sang. Dans le verre, elle incorpore des photographies, des dessins, des épingles et de menus objets. Les œuvres résultantes n’ont rien d’un ouvrage scientifique. Il y est plutôt question de métamorphoses, de transmission de la vie, d’éblouissements, de passions et de sentiments…

Jeune artiste formé à l’illustration en Belgique, Nathan Chantob reconnaît volontiers que c’est, avant tout, l’école de la rue qui lui a donné son identité.
Portraitiste de l’humain, il se définit comme héritier de Schiele, Munch et Freud. Sa peinture dénie toute considération intellectuelle, toute théorisation et ne revendique que sa seule matérialité. Il peint d’instinct, mêlant techniques et matériaux en faisant fi des règles de l’art et de ses conventions. Ses toiles, percutantes, puisent leurs forces dans la seule matière et en font jaillir une émotion sans fard qui s’adresse directement au spectateur et le renvoie à lui-même.

Thomas Chevalier, peintre touche-à-tout, a une prédilection pour le portrait. Il figure des anonymes ou des proches, dans des poses ou des postures qui s’inspirent des compositions de la grande peinture classique. Certains personnages sont figés dans une neutralité qui évoque une évidente sérénité. D’autres, masqués, déstabilisent le spectateur en instillant une forme de malaise provoqué par l’opposition entre un propos résolument moderniste et une technique ancestrale.
Thomas Chevalier peint en couches minces, sans effet de touche ni grand geste, dans une technique lente et minutieuse qui se veut non démonstrative, pour ne laisser cours qu’à sa volonté de figer un instant, un sentiment, un indicible.

Juliette Choné trouve son inspiration dans la poésie de l’inachevé, de la simplicité et du vide.
Son art est écartelé entre banalité et angoisse aux accents parfois surréalistes, entre esthétique et vulgarité, entre classicisme intemporel et volonté d’exprimer le monde dans lequel elle vit.
Elle réalise des installations, des photographies, des dessins, des collages... Elle découpe, recadre, grossit, assemble, superpose, allège, abîme, reconstruit pour donner vie à la matière, pour montrer le détail, pour parler de l’essentiel, de la poésie.
Juliette Choné a longtemps travaillé sur l’enfance et sur son langage, sur la métamorphose des corps, notamment à travers les contes. Elle a notamment créé un univers de petites robes de métal, de papiers, de tissu et de charcuterie, cousues, suspendues à un fil rouge, celui du sang et de la vie.

Henri Clément pratique la photographie à trois dimensions en produisant des hologrammes recourant à la technique de l’imagerie lenticulaire. Ses propositions donnent l’illusion de la profondeur, changeant d’aspect quand le spectateur se déplace devant l’œuvre.
Au-delà du spectaculaire du résultat, Henri Clément nous propose une véritable vision plasticienne de ses sujets, que ce soient des nus, un poilu sortant de sa tranché, baïonnette au canon, ou un paysage panoramique déclinant les quatre saisons de l’année.
D’un point de vue technique, les tirages sont réalisés au moyen de la technique dite du tirage adhésivé, réunissant entre quarante et soixante points de vue entrelacés sous un réseau lenticulaire.

Nicolas Cluzel est un jeune artiste formé à Aix-en-Provence. Il pratique une peinture expressionniste d’une rare violence.
Il y a dans ses mises en scène de saccages, de corps en éclat, d’explosions, de corps déchiquetés, une forme d’obscénité, au sens étymologique de ce terme : obscenus – de mauvais augure.
Christian Noorgerben écrit : « Nicolas Cluzel est un bougre-à-peindre qui étreint tous les délits délurés d’une peinture à grands délires. Il ne craint pas la chute libre, et abandonne tous ses repères. Il sait lâcher ses coups d’art à coups acérés de scalpel mental. Ses traits esquissent des apparences violentes, déchirent les attendus graphiques, et outrepassent les périmètres normes. Il œuvre à l’arrache, et ses arrachements cruels crucifient la séparation d’origine, quand le corps humain, pour faire exister l’humanité, prend distance tragique avec le corps de l’univers. Nicolas Cluzel sait oser l’abîme. »

Thierry Couet, graphiste de son métier, prend comme matériau de base ces dessins inconscients que l’on griffonne sur un sous-main, en ayant l’esprit occupé à autre chose, ce que les Anglo-saxons nomment telephone scribblings.
Il en sélectionne des fragments, les traite sur ordinateur, les colorise de façon plus ou moins arbitraire, puis en effectue d’immenses tirages photographiques qu’il monte sur Diasec.
Les œuvres résultantes ne trahissent que très lentement leur origine. Au premier abord, elles pourraient être assimilées à des productions de l’art brut ou à des manifestations du street-art. Ce que l’artiste démontre ainsi, c’est que, comme dans un iceberg, le sens n’est qu’une infime partie émergente de la masse de l’inconscient.

Dans ses peintures, dad.G nous présente une galerie de ses monstres familiers, minotaures déchus, capricornes déboisés, crocodiles prognathes, rennes exfoliés, singes défigurés, marsupiaux hébétés ou poulets hypertrophiés par les hormones.
Ses créatures n’ont rien de menaçant. Elles forceraient même la sympathie ou la compassion. Un trait faussement maladroit les délimite. Les couleurs sont vives, la profondeur abolie, la perspective déniée.
Le spectateur est invité à se glisser dans leur histoire, à y prendre sa place, mais sans trop les déranger, car leur vie est dans un ailleurs que le peintre ne contrôle pas toujours. « Cohabitons, certes, mais sans nous dicter notre bonhomme de chemin, car c’est une vieille affaire entre nous et l’artiste » semblent-ils nous dire.

Les Fragments de l’encyclopédie du rien de Laurent Delaire s’intéressent aux qualités formelles de l’écriture mais aussi à la posture et à l’état d’esprit qu’elle requiert du scripteur et du lecteur potentiel.
Ils revisitent, à la mode de notre époque, les grimoires des anciens alchimistes. Les rouleaux couverts de signes et les formats oblongs peuvent aussi évoquer la tradition judaïque et certaines spiritualités orientales. Le graphisme blanc, écriture dématérialisée, fait penser aux encres sympathiques des espions et des cryptographes. Il joue sur les notions d’apparition et de disparition, de d’absence et de présence, d’évidence et de sens caché.
Laurent Delaire s’exprime avec subtilité et délicatesse, avec une extrême économie de moyens, laissant à chaque spectateur son point de vue unique. Le support n’est, finalement qu’un catalyseur de l’émotion, révélateur de significations plus que porteur de qualités et de sens propres. Une invitation à une épiphanie du regard…

Sur la surface parfaitement polie de pièces métalliques géométriques, rigoureusement découpées, Christophe Dentin projette des images numériques animées. La confrontation entre la matérialité froide, figée et inflexible du support et la chaleur animée, immatérielle et fuyante des images provoque un choc qui déroute et fascine.
Les vidéos, se répétant en boucle à l’infini, n’obéissent à aucune logique narrative. Ces sculptures-vidéos développent l’idée d’un temps simultanément suspendu et répétitif. Elles matérialisent une rupture tant avec la tradition de la contemplation d’un objet esthétiquement parfait qu’avec la pratique de visionnage de vidéos, déstabilisant le spectateur dans les repères spatio-temporels auxquels il a l’habitude de se fier.

Sandra Detourbet a longtemps pratiqué l’art mural avant de se concentrer sur une recherche personnelle en atelier ou sur des œuvres réalisées in situ lors de manifestations publiques.
Fascinée par la figure de Narcisse, ses compositions donnent une grande place au corps, à son reflet et à ses déplacements. Elle restitue les figures de mémoire, comme des résurgences d’images qui l’ont frappée ou émue. Son dessin, spontané, ne rechigne pas à paraître parfois enfantin.
Sa manière de faire laisse une grande place à l’imprévu, avec un résultat qui échappe souvent au contrôle raisonné de l’artiste. Les images prennent alors leur liberté et contribuent à élaborer un monde autre, reflet spéculaire déformé de notre propre univers.

Depuis des années, Dominique Digeon se confronte au papier sous tous ses aspects. Il lui fait subir des transformations qui visent à rendre unique ce support normalement dévolu à la multiplication d’un message uniforme. Il le pèle, découpe, tresse, perfore, déchire, lacère, colle, macule, gratte, incise… Son propos est de souligner de façon visuelle, sensible et poétique, l’opposition entre l’apparente fragilité de son matériau et sa résistance insoupçonnée.
Dans la série exposée, Dominique Digeon trouve sa source dans les bas-reliefs d’Abomey, ancienne capitale du royaume du Dahomey, l’actuel Bénin. On y retrouve, pêle-mêle, des animaux, des scènes historiques, des sentences, des artefacts ou des divinités vodous. L’artiste établit un lien entre le modelage, tridimensionnel sur torchis, et le papier occidental, voué à un espace à deux dimensions. Selon ses propres propos, Dominique Digeon a trouvé, dans cet exercice, un écho à certaines des problématiques abordées dans ses précédentes séries : citation et variante, fond et forme, cerne et limite, tactilité du support, construction en damier, couleur matière, géométrie ésotérique…

Marie Donnève, formée aux arts du spectacle, est une autodidacte en peinture. De son métier d’origine et de sa pratique de chantiers pluridisciplinaires, elle s’est approprié les notions d’hybridation, de métamorphose, de transformation.
Ses peintures se situent dans un entre-deux, probablement fragile, où l’absurde se confronte à la réalité, le factice au concret, l’être au paraître, la certitude au doute, le fantasme à l’évidence, l’absurdité à la froide rationalité… Elle pratique, non sans humour, le détournement – à vrai dire, il serait plutôt question de kidnapping, sans demande de rançon – d’images banales, privées ou tirées de l’actualité, pour les acclimater dans un environnement autre, après avoir consciencieusement brouillé les pistes et effacé toutes les traces du crime.
De cet espace de liberté qu’est l’acte de peindre, elle fait, selon ses propos, un dialogue avec l’étrange et le monstrueux, une analogie d’une évolution, d’une métamorphose, la manifestation de la présence indicible d’un autre, d’un ailleurs.

Partie de la poésie et des livres-objets, Nathalie Dumonteil, est passée au papier mâché pour donner une troisième dimension à son travail. Ses sculptures s’enracinent dans le langage, sont inspirées par les processus géomorphologiques et mettent en œuvre une économie de la récupération, du recyclage.
L’artiste procède par empilement de modules élémentaires de matériaux recyclés, préalablement transformés et préparés. Le geste est simple et répétitif. Les formes croissent par accumulation de feuilles de papier ou de carton, de petits blocs de papier mâché, à l’instar des processus géologiques, des strates, des éboulements et des concrétions minérales.
Les papiers recyclés portent une écriture qui, même partiellement effacée, demeure dans l’œuvre finale, à la façon des couches les plus profondes d’un palimpseste. Ces restes mémoriaux et les stigmates de leur transformation imprègnent les sculptures, mais restent au cœur de l’œuvre, toujours prêts à resurgir.

Carole Duvillier peint des fantômes. Ses personnages, femmes ou enfants, sont souvent sans visage ou masqués. Leurs corps se dissolvent dans l’environnement. Au premier regard, les couleurs douces et fluides nous entraînent dans un univers apparemment heureux et sans problème. Féminité assumée et enfance insouciante…
Ce n’est qu’au second regard, que l’on découvre la vacuité des têtes et des corps réduits à des enveloppes plus ou moins fermement délimitées. Le spectateur, piégé, se retrouve face à des spectres, acteurs d’une histoire dont le scénario reste à écrire mais qui s’ancre profondément dans son expérience personnelle.

Ancien tagger dans les années 1990, Énigme09 découvre le photomontage en 2009. Le peintre Jacques Monory le confortera dans la voie qu’il a choisie en lui suggérant une approche poétique de son art.
Ses compositions assemblent des éléments issus du monde de la publicité ou de la culture populaire et d’autres appartenant au corpus de l’Histoire de l’art. Leur mélange est décapant, détonnant, surprenant, dérangeant, mais incite aussi à s’interroger sur le statut des images et sur une éventuelle hiérarchie des valeurs entre elles.
L’artiste arrive à donner un sens à des signes familiers, vidés de tout contenu du fait de leur trop grande présence. Mais, bien entendu, ce sens est, le plus souvent, très éloigné de leur signifié originel. Énigme09 résume son credo artistique en une formule lapidaire : « donner la parole aux images pour nous ouvrir les yeux. »

Matthieu Exposito a plusieurs cordes à son arc : dessinateur, peintre, caricaturiste, céramiste, graphiste, performeur, installateur, land-artiste… Mais, quel que soit son mode d’expression, c’est le dessin qui est premier, qui structure et architecture ses œuvres.
Sa série Poésie urbaine n’échappe pas à ce primat. Elle est composée de dessins et de céramiques. Même une certaine paresse intellectuelle pousserait à penser que les premiers sont des esquisses préparatoires des secondes, il n’en est rien. Les dessins et les œuvres en volume sont des produits accomplis, autonomes, auto-suffisants. L’artiste essaie pourtant de brouiller les pistes en datant, à la minute près, ses dessins, comme pour nous convaincre qu’il ne s’agit que d’un fragment d’un tout, mouvant, évolutif et définitivement inachevé. Le croira qui le voudra…

Jens Ferm caractérise volontiers son travail par quelques notions clé : emblème, construction du temps, visage, qualité de la douleur et de la couleur, amour du détail, musique…
Les emblèmes sur les toiles de Jens Ferm sont tirés de la réalité banale – serpent, maisons, slip, fleurs, poissons, mains, visages, voitures, pluie… – et neutres, orphelins de toute signification. Le temps est matérialisé par des traits identiques dénombrant des unités temporelles à découvrir : microsecondes ou millénaires… Les visages sont effacés et réduits à des contours qui en découpent l’absence.
Visible et invisible sont les métaphores de la couleur et de la douleur. Toutes deux se donnent à voir et à ressentir dans ses œuvres. L’amour du détail est omniprésent dans la facture. Quant à la musique, elle est le bruit de fond, l’épine dorsale de la composition.

Nicolas Gasiorowski se définit comme peintre d’un instant visionnaire imprévisible. Sa pratique – peintures et sculptures – a des parentés formelles avec l’art brut ou singulier. Ses peintures sont figuratives, structurées par un trait incisif et par des aplats de couleurs vives.
Elles sont narratives, peuplées de créatures familières – bêtes, femmes nues, musiciens, bouffons, humanoïdes indéterminés tels ceux que l’on trouve dans les dessins d’enfants –, tous acteurs et parties prenantes d’une vie inventée, d’un imaginaire tour à tour gai, mélancolique ou hilarant.
Nicolas Gasiorowski est un amuseur qui se propose de nous accompagner dans un exercice salutaire pour exorciser nos craintes et nos refoulements.

Raphaële de Gastines n’a jamais regardé les films de série B. Pourtant, les personnages de ses tableaux ont les attitudes stéréotypées d’acteurs terrorisés qui veulent susciter un frisson d’épouvante. On peut ainsi y voir un personnage saisi d’effroi, tenant à la main une lampe de bureau allumée, errant dans une forêt de carton-pâte, un autre en extase quasi mystique, emberlificoté dans les tuyaux d’un aspirateur domestique, un troisième manipulant un bidon de produit pour laver les vitres comme s’il s’agissait d’une arme de poing…
L’artiste nous dit et répète que la nature, belle par construction, peut aussi devenir hostile, à l’image de l’homme qui s’en est détaché au fil des siècles, au point de la détruire. À la fois cri de révolte et sommation sans frais, les peintures de Raphaële de Gastine sont, malgré de subtiles touches d’humour, de véritables gifles pour le spectateur.
Salvatrices baffes…

Les peintures de Pierre-Yves Gianini s’inscrivent dans la longue tradition de l’art dit construit et, plus spécifiquement, de sa tendance cinétique, même si elles ne sont animées d’aucun mouvement. On peut aussi évoquer le luminocinétisme de François Morellet ou de Julio Le Parc, même si ses tableaux, peints à l’huile, ne recourent à aucune source lumineuse.
La lumière, intense, vient de l’intérieur de la toile. Elle naît de la juxtaposition des formes et des couleurs dans un assemblage qui s’appuie sur la théorie physique des croisements de réfraction lumineuse. La dimension musicale n’en est pas absente. On pense à Survage et à ses Rythmes colorés, à Valensi et à sa peinture musicaliste, aux synesthésies qui inspirèrent Scriabine et Messiaen.

Gibergues a longtemps dessiné des costumes, puis des mannequins, avant d’en venir au portrait.
Ses figurations doivent beaucoup au cinéma. Ses personnages démesurés, incarnant les fantasmes du réalisateur, semblent tout droit sortis de l’univers de Fellini. La vulgarité, les poitrines hypertrophiées et la sexualité outrancière rappellent les films de Russ Meyer. Son monde d’infirmes, d’obsédés et de vamps décaties est proche de celui de von Stroheim.
L’efficacité visuelle et émotionnelle des peintures de Gibergues tient au décalage perçu entre la représentation réaliste et conventionnelle des modèles médiatisés qui l’inspirent et la réalité physique de nos contemporains. On peut y lire le procès en creux de la vulgarité de notre société.

Isabelle Girollet, photographe, a été formée à l’école de la publicité et de l’édition.
Elle s’intéresse aux paysages urbains ou industriels, dès lors qu’ils sont colorés. Ses cadrages rigoureux en extraient des détails qui, dans un implacable équilibre des lignes, des plans et des plages colorées, ont la qualité plastique de tableaux abstraits. L’appartenance de cette tranche de réalité magnifiée et transcendée à un ensemble plus prosaïque n’est ni perceptible ni identifiable.
Isabelle Girollet nous engage à voir autrement. Elle nous invite à une autre façon d’appréhender la ville, les usines et les chantiers. À trouver un peu de poésie et de source de satisfactions esthétiques dans un environnement qui en manque cruellement…

Charles Giulioli, ingénieur de formation, caresse, depuis plus de dix ans, le fantasme de réaliser une machine à peindre qui serait capable de produire des images nouvelles à partir d’un nombre minimal de contraintes et d’éléments fixés a priori.
Cette machine est matérialisée par un programme informatique, le logiciel L’œuvre sans fin, qui s’inspire de la façon dont l’artiste procède à l’atelier mais gomme toute trace de sensibilité individuelle en confiant certains choix subjectifs à l’ordinateur et à son générateur de nombres aléatoires. Le programme est alimenté avec des dessins à l’encre de Chine, préalablement numérisés et avec quelques principes de composition qui peuvent être définis ou modifiés par l’artiste-programmeur.
Charles Giulioli s’étonne du résultat : « la liberté, la contingence des images produites grâce au hasard donne à l’œuvre une légèreté singulière qui est peut-être celle de la vie même. Le but original de singer la peinture s’efface et les œuvres numériques prennent petit à petit leur autonomie. »

Uruguayenne vivant à Paris, Marta Grassi s’inspire de contes pour enfants, de fables et de légendes pour créer une série de dessins dans lesquels des personnages féminins, accompagnés d’animaux, remettent en cause les caractéristiques normalement associées à ces bêtes. Le loup n’y est pas nécessairement méchant et les petites filles totalement innocentes.
Ses personnages féminins ont la gracilité des madones de la Renaissance italienne. Elles sont affectées, parfois, par les prémices d’une très virgilienne métamorphose qui leur confère quelques-uns des attributs de leur animal de compagnie.
Marta Grassi raconte des histoires, mais se refuse à nous en donner la clé, nous laissant entièrement libres de construire, à partir de ses images troublantes et ambiguës, la narration ou le voyage mental qu’elles nous inspirent.

Christophe Gravis revendique la diversité et la multiplicité des approches, refusant de se laisser enfermer dans une des cases prédéfinies qui structurent le discours critique sur l’art.
Sa pratique artistique est polymorphe et, partant, difficilement cernable, réfutant d’emblée toute analyse critique. On peut, cependant, y discerner les influences de Klein, de Warhol, de Duchamp, de Beuys et de l’art brut, ainsi qu’une volonté d’élaborer un propos à plusieurs niveaux de lecture : social, poétique, culturel.
Pour le reste, mieux vaut laisser l’artiste s’exprimer : « Je suis souvent interpellé par les notions de contrastes, de diversité et de confrontation. Sans doute parce qu’elles reflètent notre monde. Alors j’utilise une multitude de signes dont l’assemblage tend à construire un langage […] à résonances multiples. Il pourrait s’accorder à la sensibilité de celui qui s’emploie à le décoder puis l’inviter à faire son propre cheminement. »

Gilles Grimon, peintre, fait d’un motif graphique un portrait… À moins que ce ne soit le contraire…
Ses sujets, des visages féminins répondant aux stéréotypes de la beauté contemporaine normalisée, cadrés très serré, ne suscitent aucune empathie a priori. Cependant, le résultat attire et fascine le spectateur.
À chaque étape du processus créatif, le portrait change de couleur et de graphisme. La superposition des états successifs crée une ambiguïté perceptive : l’observateur voit-il un volume ou un simple graphisme, une image ou une alternance de couches picturales brillantes et mates ? L’œil et la raison ne peuvent trancher, oscillant perpétuellement entre ces différentes options.

Guacolda – pseudonyme emprunté au nom d’une princesse indienne – grave, peint, mixe, brode et assemble des figures.
Son univers pictural est évanescent, en apesanteur, à la limite de l’invisibilité, techniquement vide, mais pourtant très présent et prégnant. Quelques traits affirmés, des fils chamarrés, des taches ou traînées plus sombres, un minimum de plans colorés suffisent pour affirmer la matérialité d’un monde transparent, probablement voué à la dissolution, mais tellement attachant.
Guacolda nous interpelle, nous invite à sortir des autoroutes des évidences pour nous emmener sur des chemins de traverse, à développer notre attention pour les aspects les plus subtils de notre environnement, plus essentiels, finalement, que la superficialité clinquante qui caractérise notre société.

Marianne Guillou réalise des installations qui s’ancrent dans l’actualité et traitent des rapports entre la nature et la culture. Ses matériaux de prédilection sont la céramique et le dessin, ce qui n’exclut pas le recours à d’autres techniques, comme la pierre, le plâtre, l’argile, le bois, la photographie ou la vidéo.
Par exemple, l’installation Toutatis ou l’ombre du temps, dessin mural au fusain, complété par du plâtre patiné, de la porcelaine, de la faïence et du bois, développe une allégorie dans laquelle des mots sont associés à des objets : peur avec une vieille rose en bouton pleine de piquants, doute avec des ornières et des éclairs de lucidité et d’idées cabossées, tolérance avec une petite montagne aux chemins escarpés, force et rage avec des sillons indélébiles inscrits dans des pièces de bois.

Charlotte Hess, photographe, renouvelle et actualise la tradition du portrait de l’Âge d’Or la peinture hollandaise. Ses clichés, sur des fonds noirs ou sombres, sont tirés sur toile et somptueusement sertis dans des cadres en bois ouvragé. La présence tutélaire de Hals y est perceptible.
Au-delà de cette forme de mimétisme cultivant, non sans talent, l’anachronisme, Charlotte Hess aborde un thème plus actuel et pertinent, celui de la relation entre le portraitiste et son sujet. « Mon projet est né de cette envie de renouer avec ce moment inestimable de rencontre entre un artiste et son sujet, ce temps pendant lequel le lien se crée et où chacun se met au service de l’autre dans un dialogue silencieux. L’artiste offre son regard, le sujet l’accepte et se prête à la mise en scène. L’échange est éminemment au cœur de ce travail. » déclare-t-elle.
En une époque où l’individualisme et la désocialisation sont devenus monnaie courante, cette démarche nous interpelle et nous rassure.

Jadikan pratique le lightpainting, technique inventée par Man Ray en 1935, consistant à recourir à de longues durées d’exposition dans une obscurité presque complète. Un rayon lumineux de faible intensité est alors utilisé comme un crayon ou un pinceau pour dessiner des lignes à la surface de l’image. Cette technique a des rapports avec le graffiti et le street art, avec la calligraphie, avec la chronophotographie, avec la chorégraphie et avec la peinture gestuelle, transposant, en quelque sorte, la technique du dripping de Pollock de la peinture à la photographie.
JF, anthropologue et photographe, réactualise l’ancienne technique de la vue stéréoscopique.
Leur projet en commun consiste à marier la technique du lightpainting avec celle de la stéréoscopie. Histoire de montrer que les procédés anciens peuvent se réinventer avec des technologies contemporaines…

Comment matérialiser une tension dynamique dans une peinture par définition statique ? Comment saisir un flux progressif dans une figuration inerte ? Comment fixer le temps dans l’espace d’une toile ? Telles sont les questions auxquelles Kwang Bum Jang tente d’apporter une réponse dans ses œuvres insolites.
C’est à travers la figuration du phénomène d’usure que l’artiste élabore sa réponse. Il commence par couvrir toute la surface de la toile vierge de plusieurs couches alternativement blanches et colorées. Cette étape matérialise l’écoulement du temps, dont seul le dernier instant est perceptible, masquant les instants précédents. Dans une deuxième phase, l’artiste enlève de la matière en ponçant la surface de la toile, s’appuyant sur des objets de formes diverses placés au dos de la toile. Il procède ainsi jusqu’à l’apparition des couches inférieures, colorées. Il en résulte un effet de moirures, d’auréoles, d’ocelles, qui dynamisent la surface, et révèlent, en un processus à rebours, dans une profondeur qui demeure inframince, le feuilletage du temps initial de la genèse.

Depuis 2003, François Jauvion porte un regard critique sur notre société, abordant des faits d’actualité qui ont un impact majeur sur nos vies. Son approche n’est pas austère, mais s’appuie sur un univers plastique ludique, coloré et ironique pour forcer le spectateur à s’interroger sur l’état du monde : environnement, extinction des espèces, réchauffement climatique, égoïsmes, irresponsabilité politique, génocides...
Pour mieux faire passer ses messages, l’artiste fait appel au retable polyptyque, outil conçu, à l’origine, dans un esprit didactique auprès de fidèles illettrés. En notre temps, même si l’analphabétisme a régressé, la plupart de nos contemporains semblent toujours aussi aveugles devant des faits essentiels. Les retables provocateurs et gentiment déjantés de François Jauvion tentent, en revenant à des recettes éprouvées, de remédier à cet illettrisme intellectuel.

Laurent Joliton trouve ses sujets, au hasard des pages, en surfant sur Internet.
Il peut jeter son dévolu sur les images les plus banales, insignifiantes, sans prétentions plastiques. Ce qui l’attire, ce sont les tranches de vie, les témoignages d’humanité dans ce qu’ils ont de plus modeste, d’insignifiant. Il les distingue, les tire de leur anonymat pour en faire des sujets de création. Ce faisant, il souligne, en creux, combien Internet banalise les images et génère, chez nos contemporains, une forme d’indifférence et d’oubli du sujet.
La pratique lente et minutieuse qu’est la peinture lui donne le temps d’analyser en profondeur ces images, de les interroger et de les restituer en jouant sur les empâtements, les flous, les transparences, les textures et les nuances… Une véritable mission de rédemption de la banalité…

Karine Jollet produit des sculptures en tissu.
Ses volumes, cousus à la maison et remplis de fibre polyester, n’ont aucune parenté avec le vêtement, un des usages traditionnels de son matériau. Ils tiennent parfois des pièces d’anatomie, d’une anatomie plus rêvée que réelle, même si un souci de réalisme est toujours présent. Ce n’est pas pour autant qu’elles penchent du côté d’un symbolisme évanescent. Ses pièces sont bien présentes, incarnées, dérangeantes parfois par leur insolente matérialité, malgré leur absence de couleur.
C’est plutôt du côté du rapport entre le corps et la lumière qu’il faut chercher l’apport le plus original de Karine Jollet. La blancheur du support en fait un champ idéal pour la projection des ombres ambiantes, mais aussi de celles qui hantent la psyché du spectateur.

Fabien Jouanneau peint des épiphanies, des manifestations. Dans ce projet un peu fou de figurer la transparence – étymologiquement ce qui paraît au-delà – il recourt à des voiles polyester, non pas pour leurs qualités intrinsèques mais pour leur capacité à occulter ou masquer, à brouiller ou révéler. Il les superpose, à distance l’un de l’autre, pour créer un entre deux où tout semble pouvoir advenir.
Cet espace incertain, entre matérialité et évanescence, impose une certaine forme de lenteur, « celle qui nous construit, fait appel à notre mémoire, et tient à distance évidence et immédiateté » dit l’artiste. Voiler pour mieux révéler. Faire apparaître la disparition. Masquer tout en montrant… Voici quelques-uns des paradoxes de ces productions fascinantes.

Corinne Jullien nous propose un univers apparemment inoffensif, évocateur de contes et de légendes, dans les couleurs acidulées, empruntant les tracés faussement maladroits des illustrations pour la littérature enfantine.
Mais tout ceci n’est qu’apparence, couverture pour un propos plus subversif. Son univers est d’une inquiétante familiarité, proche de l’inquiétante étrangeté, l’Unheimichkeit freudienne. L’artiste renvoie au spectateur le reflet de sa propre histoire, image d’abord dérangeante puis qui, une fois identifiée, devient sienne.
La mise à distance est opérée par le recours à de grands formats, apparemment incompatibles avec l’intimité des scènes figurées, et par l’imposante présence du personnage principal, rigoureusement centré. Mais ceci n’est qu’un leurre, un piège trompeur, car quiconque se hasarde à entrer dans ce travail est immédiatement happé par son propre point de vue, obligé de mettre son imagination à contribution pour combler les lacunes spatiales et narratives, de plaquer sa propre mythologie sur celle proposée par l’artiste.

On connaissait les sculptures touchantes de Ruta Jusionyte mais on ne la savait pas peintre.
En cohérence avec sa pratique en volume, la peinture de Ruta se situe dans la mouvance post-expressionniste mêlée de romantisme qui s’épanouit à Berlin. Son univers est peuplé d’animaux et des chimères baignant dans une atmosphère mystérieuse et fantasmatique qui renvoie aux racines d’une culture populaire très marquée par la Lituanie dont l’artiste est originaire. Bien que plane, ses peintures ont cette rondeur, cette épaisseur métaphysique qui témoigne de la maîtrise d’un espace dont le nombre de dimensions dépasse les trois de la géométrie conventionnelle.
Les mises en scène sont à la fois étranges et familières, comme dans un rêve inachevé. Elles sont follement libres récusant d’emblée toute tentative d’explication rationnelle. Son travail est figuratif mais « n’a pas de modèle à représenter »… C’est ainsi que Lyotard définissait le figural

Bénédicte Klène se définit comme chroni-croqueuse. Le papier et le dessin sont toujours au centre de son processus créatif.
La série Les Petits Riens est réalisée sur des carnets de croquis de voyage que l’artiste a longtemps tenus secrets. Le dessin y tient son double rôle de mémorial et d’intermédiaire. Mémorial en ce qu’il capte des instants définitivement révolus et permet d’en garder une trace potentiellement réactivable. Intermédiaire en ce qu’il sert de point de passage dans la constitution d’œuvres moins intimistes : peintures, performances ou, plus simplement, mise en scène des carnets de croquis…
Mouvement pendulaire incessant entre les dimensions publique et intime, en évitant l’écueil de l’exhibitionnisme… Métaphore limpide du rôle du créateur en tant que passeur de messages et/ou d’émotions.

François-Xavier Lagey, Breton, est collagiste, pratique découverte à travers les œuvres de son compatriote Jacques Villeglé. Mais la comparaison s’arrête ici, car ses travaux non rien à voir avec les productions du lacérateur anonyme.
Son matériau de base est prélevé dans les multiples images produites par notre société ultra-consumériste. Sa démarche consiste à désarticuler ces images, à les déconstruire – à les détruire, même –, puis à les reconstruire, avec des ajouts de peinture acrylique, dans des agencements denses, polysémiques et quelque peu provocateurs.
« Le collage, de par sa nature est un langage polymorphe. On peut le façonner selon ses humeurs, ses passions, ses opinions, réinterpréter ou émerveiller avec humour ou gravité, ou bien encore lui donner une fonction politique ou critique de la société de consommation. Lié à la peinture et au dessin, le collage devient un langage universel, une matrice à tiroirs métaphoriques, véritable imagerie catalysatrice d’émotions pures à l’ordre bien établi. » écrit l’artiste.

Le corps et les plis sont au cœur des préoccupations de Véronique Lagriffoul.
Ses personnages sont drapés de plis d’argile noire qui les enserrent au point de les étouffer. Ils en sont réduits à une étape régressive de leur développement, à un retour à l’état fœtal, à moins que ce ne soit une anticipation d’une future et probable fossilisation. Les individus réduits au silence et à la paralysie ont perdu toute velléité de protestation, toute volonté de s’échapper de la gangue qui les immobilise. Seuls les plis témoignent d’anciennes tentatives, d’efforts dérisoires et avortés pour échapper à leur sort.
Ne doit-on pas y voir une métaphore limpide des effets mortifères de la pensée unique, du conditionnement intellectuel et de l’endoctrinement sur la part d’humanité qui reste en nous ?

Isabelle Leclercq est céramiste. Après avoir produit des objets de petites dimensions, destinés à la décoration domestique, elle a ressenti le besoin de sortir de ce carcan pour donner libre court à son inspiration dans des œuvres de plus grande taille.
Ses pièces mettent en avant l’écorce, l’enveloppe, la coquille, formes rassurantes et protectrices pour qui les habite mais moins sécurisantes pour l’observateur. Les formes rondes, sont à la fois cocon, chrysalide, matrice, ventre, torse creux, creuset ou nid… Elles sont signes d’une fragile féminité, évoquant la genèse, la gestation, le cycle de la vie…
Cycle qui va de la terre vers l’inéluctable terre… On pense au sit tibi terra levis des inscriptions funéraires latines.

De formation scientifique, Tania Le Goff navigue entre les univers rationnels de la science et intuitifs de l’art, avec la profonde conviction qu’artiste et scientifique sont tous deux dans une démarche de recherche. Ses travaux s’appuient, le plus souvent, sur des documents ou concepts scientifiques, qu’elle fait basculer dans le monde du sensible pour en donner une lecture poétique ou critique.
Ses photographies de façades d’immeubles collectifs, tirées sur métal, rendues dans une frontalité presque impersonnelle, évoquent les rayons d’une bibliothèque où chaque ouvrage intègrerait et archiverait l’histoire d’une famille, de son passé, de son présent et de son devenir…
Vision glaçante de la progressive marchandisation de toute humanité.

Photographe, graveuse et créatrice d’installations, Caroline Leite puise son inspiration dans les petites choses de la vie quotidienne.
Chaque jour, lors de ses déplacements, à pied ou en bus, son objectif fixe un regard en mouvement, laissant toute sa place au hasard et à ses aléas qui révèlent des aspects inattendus de lieux pourtant connus.
Dans le calme de son atelier, elle sélectionne certaines de ces images et en réalise des tirages, en noir et blanc, sur des blocs de béton, reconstruisant ainsi, a posteriori, des tranches d’histoires urbaines qui croisent l’expérience personnelle de l’artiste, son imagination fertile mais aussi celle du spectateur-voyeur-regardeur.
Caroline Leite se comporte comme une archéologue du cadre de vie citadin quotidien mais aussi comme une observatrice impuissante de la fuite du temps. Dans une série particulièrement saisissante, elle réalise de précieux tirages de petites dimensions, qu’elle scelle entre deux plaques de verre serties par une bande de plomb… Tentative désespérée de fixer définitivement l’insaisissable ? Sarcophages ou cercueils plombés de petites nostalgies fugaces ?

Les sculptures de Le Joubioux prennent pour point de départ une gamme restreinte d’objets de grande consommation : des éponges synthétiques et des briques d’emballage alimentaire de lait ou de jus de fruit.
Il les agrandit de façon démesurée et les transpose dans les matériaux les plus improbables : bronze, fonte d’aluminium, résine, terre cuite, bois, polystyrène… n’hésitant pas à dorer à la feuille d’or la forme, réputée triviale, d’un tampon à récurer…
Au-delà de la mise en évidence de la réelle plasticité de ces formes que l’on ne voit plus à force de trop les voir, Le Joubioux nous livre un propos doux-amer sur la vanité de notre monde où les feux médiatiques peuvent faire d’un banal quidam une star… Il nous invite ainsi à faire preuve d’humilité, nous invitant dans des chemins de reconnaissance – et de connaissance de nous-mêmes – qui récusent d’emblée le clinquant et les fausses valeurs.

« Aujourd’hui les chimpanzés regardent passer les MIG-31, comme hier les vaches regardaient passer les trains. » déclare Jean-Claude Leroux pour présenter son petit théâtre. Ce théâtre, c’est celui de juxtapositions qui cultivent l’anachronisme, les incohérences, les confrontations improbables… mais aussi des réalités que notre regard refuse d’accepter.
L’artiste revendique la sobriété à tous les étages : médium, sujet, chromatisme, matière, ligne. Ce qui importe par-dessus tout, c’est de faire voir les choses pour ce qu’elles sont, en faisant abstraction de la pompe, du décorum, du discours et même du contexte qui contaminent et dévoient la perception. Le sujet devient l’unique quête d’absolu, du désir d’atteindre l’objet sans détour, pour en saisir l’essence-même.
Au-delà des fausses idoles du beau, du savoir, de la performance, de la communication, de l’information en continu, Jean-Claude Leroux nous révèle un Homme qui reste désespérément seul, à la recherche de l’essentiel, dans un cruel face-à-face avec lui-même.

Laetitia Lesaffre est artiste peintre laqueur et photographe.
Ses photographies, à l’aspect insolite, sont pourtant naturelles, sans traitement informatique. Elle les réalise en capturant les reflets de ses sujets dans ses laques. Les clichés résultants donnent l’illusion d’avoir été pris à travers un verre cathédrale ou une vitre embuée. Le spectateur se trouve en position de voyeur devant ces sujets déformés qui émergent d’une profonde obscurité.
Frêles, instables et fragiles, ces images récusent toute volonté narrative. Elles mettent en scène un sujet qui regarde son reflet et se sent regardé, dans une chaîne introspective ininterrompue dans laquelle l’artiste, ses laques et son appareil de prise de vue ne sont que des maillons contribuant à la glorification du seul sujet.

Mathieu Lesecq Abbib pratique une peinture abstraite gestuelle, très colorée, mais cependant fortement structurée par un dessin sous-jacent qui impose une charpente à la composition. L’image finale résulte de la stratification de couches successives qui finissent par engendrer une surface complexe qui se substitue à l’image originelle et tient sa place, non comme une illusion d’un quelconque sujet, mais comme un objet autosuffisant. Quelques accidents et un soupçon d’improvisation apportent ce brin d’imprévisible qui compense le risque de répétition.
L’artiste s’exprime : « Ces grandes peintures sur papier réalisent ce que j’aime : les espaces non réduits, invitant à ne plus être seulement spectateur, mais vous proposant de vous projeter à l’intérieur. On appréhende d’abord l’espace dans sa globalité pour découvrir ensuite une accumulation de gestes ou d’événements ou d’accrocs, qui déterminent ensemble ce qu’on nomme le tableau. »

Les œuvres de Duong Le Thai sont créées à partir d’une palette graphique, imprimées sur papier, puis retravaillées à l’encre, à l’aquarelle ou à la peinture acrylique, avant d’être marouflées sur toile.
Sa thématique de prédilection est celle des hallucinations visuelles. Elles résultent de la superposition, sur un même support, de plusieurs images à des échelles différentes, sans qu’il soit possible de discerner un devant et un derrière. Des taches colorées abstraites, en forme de test de Rorschach, sans relation apparente avec les autres images, mais intimement mêlées à elles, complexifient la lecture en introduisant un nouveau niveau de brouillage.
Duong Le Thai produit aussi des œuvres en volume qui cultivent le même type d’ambiguïté ou d’ambivalence visuelle. Sa formation initiale de médecin le conduit à s’intéresser au corps, à ses articulations, mais également à sa texture et à ses habits. Dans ses dernières œuvres, il fait appel à la nouvelle technologie d’impression en trois dimensions. Il fait figure de pionnier dans l’utilisation de cette technique qui est amenée à révolutionner la production artistique en volume.

Dans une démarche que ne renieraient pas les satrapes, régents, provéditeurs et autres dataires du Collège de Pataphysique, Caty Lévêque se livre à un travail d’ethno-anthropologue prenant pour objet de ses investigations un pays et une peuplade qu’elle a inventés de toutes pièces : Pétaouchnock et les Pétaouchnockiens.
La Grande Bibliothèque de Pétaouchnock réunit des livres imaginaires, uniques, présentés sous cadre, dûment répertoriés et indexés, comme le seraient des ouvrages dans une bibliothèque traditionnelle. Mais les catégories sont, ici, délirantes et improbables : subjugation capillaire, œufs d’autruche, remèdes culinaires et littéraires, apologie du moins… Certains volumes sont accompagnés de petites saynètes, conservées sous cloche de verre, pour illustrer, en relief, leur contenu.
Dans cet univers fictif, humour et création débridée se donnent libre cours, suscitant des hiatus incongrus, poétiques ou amers, parfois proches du surréalisme.

Arnaud Lorieau a beaucoup regardé la peinture espagnole, celle de Goya, surtout. Il a fini par percer le mystère de ces noirs intenses et de leur cohabitation avec les plages lumineuses, des zones intermédiaires ou tout se passe, où le drame se noue et se dénoue. Ses toiles recréent cette atmosphère unique, en traitant des standards de la peinture de tous les temps : natures mortes, vanités, corps humains, animaux…
Il procède par séries jusqu’à épuisement de la thématique. Sa dernière suite de toiles aborde le thème du pli et des drapés. Pour ce faire, il travaille exclusivement à partir des chiffons qui lui servent dans sa peinture, les accumule, les met en forme pour figurer un motif, puis crée une scénographie avec ces objets factices, comme s’il s’agissait de sujets prenant la pose.
Suit alors un long et méticuleux travail de rendu, à l’huile, recourant à des techniques ancestrales : glacis, transparences, modulations chromatiques, ombres et lumières…
Le résultat est confondant, en ce qu’il confronte, non sans violence, une technique multiséculaire avec un regard sur le monde qui est bel et bien de notre temps.

Damien Louche-Pélissier est un entomologiste de l’imaginaire, créant de nouvelles espèces d’insectes par assemblage de menus objets glanés çà et là au fil de ses explorations : figurines de soldats, bouts de fils de fer, fragments de végétaux, morceaux de laiton, os de seiches… Il les combine et les assemble pour les transformer en insectes improbables – ou en anges, l’ambiguïté persiste – puis les rassemble, en nuées invasives, dans des installations saisissantes.
Nous sommes, ici, dans un cas de mimétisme animal inversé, le végétal ou l’inanimé simulant l’apparence du vivant. Cette permutation des rôles nous invite à creuser des relations insoupçonnées entre les règnes végétal et animal, à entrevoir une nature réinventée, à apprécier sa formidable richesse.

Après un long voyage en peinture, Hélène Loussier a abordé les rivages de la céramique sculpturale.
Bestiaire végétal, éclosions et coiffes sont les monuments les plus significatifs de cette nouvelle contrée. On y retrouve, en trois dimensions, toute la délicatesse, la tendresse et l’ironie fine que l’artiste mettait dans sa peinture. Un vent de légèreté, des réminiscences de l’enfance, des formes protectrices comme le giron d’une mère, des couleurs délicatement pastellisées, un brin de folie raisonnée, un soupçon d’introspection, beaucoup de liberté, un clin d’œil insistant, un sourire se muant en grand éclat de rire, une infinie joie de vivre et une chaleur humaine contagieuse en sont les ingrédients principaux.
Que demander de plus ?

Myrian Louvel a été très vite séduite par le caractère graphique des anciens objets en fil de fer. Depuis 1995, elle expérimente avec les matériaux les plus divers, au premier rang desquels les fils de toutes natures : fer et autres métaux, aiguilles de pin, fibres végétales…
Elle forme, tord, coude et emmêle ses fils pour créer des volumes fantomatiques, dont les ombres portées dessinent de délicats réseaux, parties intégrantes de l’œuvre. La ligne du fil sculpte et structure donc le vide sans le combler, mais engendre aussi des œuvres bidimensionnelles éphémères et changeantes.
Les objets de Myriam Louvel suscitent méditations et interrogations, tout en transposant dans la troisième dimension l’éternelle question picturale du rapport de la forme et du fond.

Christophe Loyer a inventé le skoténographe, un orgue à lumière construit sur le principe d’un invisible centré. Les skoténographies sont réalisées en chambre noire, directement sur un papier photosensible enregistrant les événements lumineux déterminés par des dispositifs de regards, sans l’intermédiaire d’un négatif ni d’un agrandisseur. À l’opposé de la photographie, qui est, au sens littéral, l’écriture par la lumière, la skoténographie est écriture de l’obscur, autour de l’obscur, à propos de l’obscur.
Le parti pris de l’artiste est de prendre la lumière dans sa relation métaphorique au regard et à la pensée. Son projet dépasse le cadre initial puisqu’il se matérialise désormais dans plusieurs domaines, dans la scénographie, les volumes, les installations, la musique, la vidéo et l’écriture. Dans tous ces cas, « l’ombre devient alors l’invisible, l’impensable, l’inconnu », déclare Christophe Loyer.

Bruno Macé, dans sa peinture héritière des traditions du passé, raconte une histoire imbriquant mots, images, formes et couleurs.
Cette histoire immémorielle, sans date ni références à un temps ou à un espace connu, conduit le spectateur du rêve au cauchemar. Aller-retour… Elle laboure un terreau imaginaire mais suggestif, né de la conjonction de transparences et d’un geste brutal et incisif. Invitation à un voyage sans visa ni destination identifiable, elle entraîne le spectateur dans une spirale, au bord d’un gouffre amer où se mêlent, dans un univers éclaté, paysages, personnages, masques, relevés géodésiques, carnets de voyage…
Déchirures et douceurs, sauvagerie et humanité, stabilité et basculement y coexistent, dans des oppositions dialectiques qui ne peuvent laisser indifférent.

Loïc Madec est un homme du XVIIIe siècle accidentellement parachuté au XXIe. Sa peinture est directement inspirée par le classicisme français du règne de Louis XIV, par sa version italienne, le baroque, et par le rococo Louis XV.
Volontiers à contre-courant de ses contemporains, il nous propose des peintures, sans prétention métaphysique ni universaliste. Elles expriment l’émerveillement d’être encore en vie dans un monde devenu mortifère. Elles célèbrent les petites choses sans importance, la joie de se rencontrer autour d’un verre, les bains de soleil dans un jardin fleuri, le papier peint charmant et désuet des chambres d’hôte en bord de mer, la volupté des arabesques dissimulées là où on ne les attendait pas, un monde ou le mot lendemain ne rime plus avec chagrin.

Malo, photographe, se met corps et âme au service de la narration d’une histoire. Ses thèmes de prédilection sont la vie, la famille, les travers de la société, qu’il traite à travers des séries, un peu à la façon dont les graveurs illustraient les journaux et les livres avant l’invention de la... photographie. On peut penser, notamment, à Hogarth et à sa série The Rake’s Progress.
La série La Vie ordinaire d’un homme invisible reprend le héros du roman de H. G. Wells et sa transposition dans la série télévisée britannique datant de 1959. Il l’accompagne, tel un photojournaliste de la presse people, dans sa vie quotidienne, bien rangée, dans un cottage anglais de la fin des années 1950.
Dans cette série, comme dans les autres, au-delà d’une perfection technique qui force l’admiration, Malo flatte nos instincts voyeuristes en nous incitant à nous substituer mentalement à l’un ou l’autre des personnages de ses histoires.

Jérôme Marichy, formé au dessin textile, mène, depuis de nombreuses années, des recherches sur le tatouage. Il met en parallèle sa propre technique picturale et celle des tatoueurs : « Le tatouage est indélébile. Il implique une décision irrémédiable. Il imprime une marque éternelle. Une des techniques utilisées en phase finale de réalisation d’un tableau peut anéantir mon travail entièrement et donc m’obliger à tout recommence dès le départ. »
Il en résulte un sentiment d’urgence et d’instabilité, de danger latent, qui pimente son expérience plastique. Son univers est celui de la culture populaire, révélatrice des aspirations et des stigmates d’une société en quête d’un inconscient collectif perdu.
Le recours à des pigments phosphorescents accentue le caractère psychédélique de ses compositions, dissimulant, sous la couche picturale évidente, une image subliminale qui ne se révèle que dans l’obscurité.

Pascal Marlin crée des individus avec des collages de matières hétéroclites – papier calque, bouts de tissu, fragments de radiographies, photographies… – sur lesquels il peint.
Ses sujets évoluent dans des environnements sans profondeur, traités à plat, dans des couleurs mates et uniformes. Seules les déstructurations des figures, que l’on imagine démembrées et rafistolées à la va-vite, suggèrent le volume.
Les visages, réalisés à partir de collages photographiques, restent les uniques composantes facilement identifiables dans ces corps boursouflés, difformes, bouffis, comme affectés d’une impitoyable maladie génétique.
Tout ceci serait tragique, si les couleurs, douces et raffinées ne venaient prendre le contrepied de la dureté du propos. On comprend alors qu’il ne s’agit que de la projection de fantasmes, d’un exutoire à des pulsions destructrices, mais aussi d’un salutaire exercice de défense et illustration de la diversité.

Matamoscas est un globe-trotter des espaces urbains. Quand il pose ses bagages dans son atelier, il déballe ses clichés, sélectionne les plus intéressants, les vectorise en noir et blanc, les combine, puis les colorise. Il recompose ainsi une sorte de carnet de voyage a posteriori, qui s’intéresse plus à l’esprit, à l’âme d’une ville qu’à ses détails factuels. Son processus est donc celui d’une fabrique de souvenirs, empreinte de subjectivité, projetant un hic et nunc sur l’écran des souvenirs d’un temps révolu.
Peu importe que la ville soit reconnaissable. Ce qui compte avant tout, pour Matamoscas, c’est de ressusciter des instants passés, de les faire revivre à l’aune des conditions émotionnelles de l’instant et du lieu présents. Une forme de compression ou de négation du temps et de l’espace… Un talisman pour se protéger de l’usure des ans et des contingences de la distance.

Concepteur de décors pour le théâtre et illustrateur, Jean-Diego Membrive découpe des gouaches de couleurs vives et les recompose avec une volonté de monumentalité qui évoque l’architecture moderniste.
À l’opposé, ses peintures sur toile résultent d’un processus d’exécution long et attentif. Leur spectre chromatique est étroit : blancs, bleus éteints, terres d’ombre, ocres… Ce sont des portraits de ses proches, traités sur des fonds neutres hérités de la peinture espagnole. Ses personnages semblent installés sur une scène de théâtre désaffectée, en souffrance de décor. Ils sont plongés dans des réflexions qui ne peuvent être qu’existentielles. Dans ses toiles, Jea-Diego Membrive renouvelle, à sa façon, la pratique des memento mori

Thibault Messac est un peintre tératologue. Il s’intéresse aux déformations, aux altérations qui engendrent ces monstres plus ou moins familiers, générateurs d’un sentiment d’attraction-répulsion, de cette inquiétante étrangeté qui habite toutes ses compositions.
Son travail s’appuie sur une observation quasi scientifique de l’anatomie des corps qu’il se propose de manipuler. Il essaie d’en comprendre la structure, les articulations, les modes de croissance, avant de leur appliquer un processus de déformation et/ou de multiplication. Les monstres résultants semblent ainsi plausibles à défaut d’être possibles.
L’informe, chez Thibault Messac, n’est pas accidentel. Il répond aux lois d’une biologie aux principes de base, certes farfelus, mais cohérents. Sa démarche s’apparente à celle de certains surréalistes – on pense notamment aux structures molles de Dalí– mais avec un systématisme scientifique presque forcené que Breton et ses amis auraient certainement condamné.

Francine Millo est fascinée depuis toujours par les cocons, les mues, les nids, ces structures protectrices qui enveloppent le corps et le protègent des agressions extérieures. Mais ces remparts de défense ne sont que temporaires, provisoires. Il faut s’en détacher ou ils tombent d’eux-mêmes. Ne reste alors que la structure creuse, vidée de son contenu.
Francine Milo construit donc méthodiquement, avec des cordons végétaux, des chrysalides à base de cercles concentriques reliés entre eux par une ficelle de papier. Elle se glisse dans les abris ainsi formés, les habite, les anime, leur donne vie, puis les délaisse et les suspend comme de pathétiques trophées.
Émerveillement, éternellement recommencé, devant le cycle de la vie et sa renaissance quand on s’y attend le moins.

Mona Luison réalise des sculptures-vêtements en appliquant des techniques artisanales à des matériaux issus de notre environnement quotidien : peluches, vêtements usagés, capsules de café, bouteilles d’eau, boîtes de conserve... Elle les découpe, les tisse, les coud… pour créer des sur-peaux qui nous racontent des histoires, celle de l’artiste, la nôtre ou celles des autres… L’hétéroclicité des composantes est une métaphore de celle de notre monde, envahi d’objets, de signes et de sens, que personne ne peut se vanter de capter – et encore moins de comprendre – dans leur intégralité.
Dans ses sculptures à porter de la série Topicality, Mona Luison associe notre anatomie aux catastrophes naturelles, aux conflits et aux guerres, à ces flux d’information qui nous assaillent, sans qu’il soit possible de statuer sur leur véracité ou sur leur pertinence. Elle nous propose une issue de secours, une façon de nous évader, en regardant de nouveau le monde avec des yeux d’enfants.

André Nadal peint sur toile, en noir et blanc, de grandes structures linéaires complexes, aux multiples symétries internes. Placées en état de lévitation dans un vide intersidéral, elles récusent et anéantissent toute velléité de perception d’échelle, de temps ou d’espace.
Le trait est incisif, inflexible, rappelant que l’artiste fut, au début de sa carrière, dessinateur industriel, en un où temps les ordinateurs n’avaient pas encore éliminé la main humaine dans les bureaux d’études.
L’artiste limitant sa palette aux seules deux non-couleurs, ses moyens d’intervention sur la surface picturale se réduisent aux variations dans le brossage et le lissage de la matière. Ceci suffit pour produire une infinité de nuances, ce que le recours à une vaste gamme de couleurs n’accomplirait probablement pas aussi sûrement.

Les peintures à l’huile de Jae Woo Park prennent leur source dans un travail préparatoire photographique.
Le caractère instantané des clichés contraste avec leur longue et laborieuse retranscription sur la toile, enchaînant superposition des couches, attente pour le séchage et retouches… Les photographies originelles sont prises rapidement, sans flash, même de nuit, ce qui leur confère un caractère flou et imprécis, comme si elles étaient reflétées dans une vitrine ou vues à travers une glace embuée.
Jae Woo Park s’attache à scrupuleusement reproduire ces imprécisions sur ses toiles, ce qui donne à ses tableaux un aspect intimiste, fragile, irréel et onirique. À l’opposé d’un hyperréalisme froid et mécanique, ses peintures nous touchent justement par leurs imperfections voulues, génératrices d’une immense délectation plastique.

Philippe Parrot Lagarenne dessine, peint et réalise des sculptures en céramique.
Quel que soit leur mode d’expression, ses œuvres sont festives et explosent d’une joie de vivre bon-enfant, aux antipodes de toute considération métaphysique. Elles sont exemptes d’angoisse et de douleur, même quand elles figurent des têtes de mort ou des animaux tués. Les touches d’humour y sont fréquentes.
L’artiste donne forme à son imaginaire fertile et jubilatoire, dans des compositions instinctives qui ne se structurent qu’au fur et à mesure de leur élaboration. Rêve et réalité s’hybrident dans des éclats de couleurs vives, des formes qui récusent tout académisme, des compositions qui provoquent un optimisme communicatif. Comme autant de pieds de nez aux pisse-vinaigre de tous poils.

Françoise Peslherbe pratique le photomontage avec un humour corrosif et dévastateur, ce qui n’exclut pas des pages d’attendrissement et de sentimentalisme. Elle observe ses semblables et leur environnement, saisit des expressions, des éclairages, des détails invisibles du plus grand nombre, les détourne et leur donne un tout autre sens. Chacune de ses compositions est un fragment d’une étude sociétale qui remet en cause les habitudes et la façon d’appréhender notre quotidien.
Chez Françoise Peslherbe, les structures impersonnelles en béton, la signalisation routière, le mobilier urbain deviennent éléments d’un monde irrationnel dans lequel des personnages colorés jouent une partition imprévue, se prêtent à des jeux apparemment futiles, mais avec l’application et le sérieux propres aux grands projets. Ils apportent une touche acidulée, inattendue et décalée, à la grisaille ambiante, entrouvrant ainsi la porte vers d’autres façons de regarder notre environnement.

Pilar du Breuil est photographe. Après s’être intéressée à des sujets à caractère social – prostitution, solitude, souffrance, racisme, féminisme, lieux désaffectés, peur de l’avenir… –, elle s’est penchée sur la nature morte, puis, plus récemment, sur des figurations de la féminité. Elle part d’un matériau pictural quelque peu suranné, mais le retraite comme si elle s’attachait à évoquer une forme de deuil de son passé.
Les clichés, trop réalistes au goût de l’artiste, sont retravaillés sur ordinateur pour leur donner une dynamique et un rythme qui gomment leur caractère anecdotique et leur confèrent une portée plus universelle. De l’évocation nostalgique du passé à l’affirmation universaliste… L’essence de l’art ?

Mélissa Pinon est une fervente visiteuse du Musée du Louvre, où elle affectionne particulièrement la peinture française du XVIIIe siècle.
Cette culture picturale acquise auprès des maîtres anciens a influencé sa propre production, résolument figurative, attachant une grande attention à la facture. Elle a copié des chefs-d’œuvre du passé – notamment La Raie de Chardin –, représenté des visiteurs devant des œuvres de Watteau ou de Vermeer, produit des portraits, des paysages ruraux ou urbains, des vanités…
Ses œuvres les plus récentes sont des natures mortes sur fond neutre : une paire de sandales, un oiseau mort, des papiers froissés, des emballages, les outils du peintre…
La sensualité de la touche, la précision du trait et la justesse des couleurs, souvent sourdes, n’occultent pas la création d’une atmosphère poétique, souvent nostalgique, preuve irréfutable, s’il en fallait encore, que le bel mestiere a encore du sens dans l’art de notre temps.

Sophie Rambert dessine avec un réalisme confondant. Les noms de Schiele, de Bacon ou de Freud viennent spontanément à l’esprit, mais son travail s’en distingue radicalement.
Sophie Rambert fait sien le propos de Valery – « Ce qu’il y a de plus profond dans l’homme, c’est la peau » – en s’attachant exclusivement à l’épiderme, à cette partie si superficielle de notre corps que l’on finit par l’oublier. Certes, la viande est derrière, mais c’est son enveloppe anorganique, comme mécanisée par l’absence de passions, qui fascine l’artiste, enveloppe comprimée, renversée, tendue ou recroquevillée, dans son absolue nudité.
Ce n’est que dans l’œil et dans l’esprit du regardeur-voyeur que ce contenant se personnalise, prend de l’épaisseur, du volume, pour se remplir d’une chair qui n’est autre que celle de ses fantasmes et de ses désirs inassouvis.

Frank-Emmanuel Rannou peint « des femmes crucifiées, suffocantes d’avoir trop aimé. […] la vie que l’on décèle parfois dans le mouillé de l’œil, […] la folle envie de vivre qui nous prend lorsque l’animal remonte en nous, l’horreur journalière des JT, la fausse proximité des réseaux sociaux. »
Dans sa cave-caverne-atelier, les modèles posent, dans un cérémonial, porteur de fantasmes, aussi vieux que l’histoire de la peinture. L’artiste se bagarre avec la matière picturale, sur le papier ou sur la toile, dans un véritable corps-à-corps, s’acharnant parfois pendant de longues heures sur un détail qui pourrait sembler insignifiant. Tout ceci pour rendre l’illusion de la spontanéité, d’un moment fugace, d’un sourire passager, d’une posture éphémère, d’un clignement de paupière… Instant choyé, arraché avec violence du magma de l’éternité…

Formée en biologie appliquée, Véronique Reinaud a gardé de ses études une propension à l’investigation de la nature, des coupes de tissus, des cellules animales ou végétales au microscope.
Ses préoccupations essentielles la poussent à donner forme visuelle à la nature intime, à opposer mobilité macroscopique et statisme microscopique, réalités perceptible et cachée. Ces réflexions débordent alors sur la recherche d’un équilibre permettant de résoudre l’opposition dialectique entre intime et collectif.
Ses peintures se figent en trois dimensions sur des supports de forme circulaire, conique ou filaire, selon les séries. Le contrôle permanent de son geste bannit toute fluctuation émotionnelle sans tomber pour autant dans une géométrie décorative.

Marion Robert, jeune plasticienne formée à l’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg, s’épanouit dans la peinture et dans le dessin.
Sa peinture, délicatement colorée, se situe dans la descendance formelle des cubistes de la seconde génération – les Villon et de La Fresnaye, notamment –, mais dans un esprit résolument contemporain. Des corps, souvent sans visage, réduits à l’état de fantôme, se superposent et s’entremêlent, émergeant de fonds qui évoquent le magma originel ou cette gangue de conformité, ce mode de pensée unique dont il est si difficile de se dégager.
Ses dessins, mordants, caricaturaux, incisifs et caustiques, témoignent d’une réelle capacité à regarder le monde et à en dénoncer les travers et les excès, tout en traduisant une réelle sympathie, une évidente compassion, pour ses défauts.

Agathe Roger peint en noir et blanc ses visions intérieures, ses émotions et ses fantasmes. Elle cultive les relations entre plein et vide, les équilibres des contrastes et les oppositions de masses évanescentes qui se répondent ou s’entrechoquent.
Les formes qui se déploient sur la toile sont les traces d’un non-dit, d’un non-lieu, d’une rencontre de formes organiques qui se sont confrontées, se sont accouplées puis se sont évanouies pour se fondre dans le néant d’un oubli.
Oubli ou archives de la mémoire, car le recours à de vieux draps, avec leurs monogrammes brodés, impose l’image d’accouplements plus charnels, se perdant dans une histoire ancienne, mais de laquelle sont issues les générations présentes.

Le monde de Michel Roty est celui du petit format, carré, où rien n’est anodin ni laissé au hasard.
L’artiste se définit comme un surréaliste postmoderne, composant des univers fragiles dans lesquels signes et symboles deviennent écriture ou notation musicale. Il raconte l’amour, la vie, la mort, la dissolution des corps, les histoires romantiques, les souvenirs d’école, convoquant de petits objets – souvenirs photographiques, fils de coton ou de fer, aiguilles de seringues… – comme pièces à conviction de sa déposition plastique.
Ses tableaux ont un caractère psychanalytique, procédant par condensation, déplacement, surimpression et latence. Ils témoignent d’un temps enfoui, refoulé, que le spectateur est invité à décrypter et à interpréter en résonance avec sa propre expérience personnelle.

L’art de Tatiana Samoïlova plonge ses racines dans l’art populaire russe, dans les loubki, ces graphismes simples et narratifs inspirés d’histoires religieuses ou populaires. Il y a aussi un peu de l’imagerie d’Épinal et certains de ses dessins évoquent les lames d’un tarot de pure invention, avec des arcanes nouveaux.
Son trait raffiné, capricieux et fantasque mêle fantaisie et grotesque, figurant des humains zoomorphes et des animaux anthropomorphes, des enchevêtrements savamment mesurés narrant des histoires dont le sens peut nous échapper, à l’instar des chapiteaux romans de certaines églises du centre de la France.
Restreintes au noir et au rouge, ses compositions tiennent des motifs décoratifs – on pense à Beardsley –, avec leurs arabesques complexes, leurs végétaux stylisés, leurs papillons improbables, leur perspective comprimée et leur espace confiné par les limites de la feuille.

Serge Saunière est un chantre du noir et blanc, dans la lignée de la peinture chinoise et de la calligraphie. Ses compositions ne singent cependant pas l’exotisme. Elles s’ancrent bel et bien dans une tradition occidentale, notamment dans celle de la peinture hollandaise classique, qui cultive et valorise les contrastes d’ombres et de lumière et, surtout, ces zones ni noires ni colorées, ce gris, ce ni ni où tout peut advenir.
Les lavis de Serge Saunière sont aussi musicaux, non pas dans une écriture rythmique à lecture horizontale, mais dans cette riche verticalité chromatique qui sublime la musique de Messiaen et des compositeurs dit spectraux. Mutatis mutandi, Serge Saunière pourrait être le Gérard Grisey des arts plastiques.

Le travail de Guillemette Schlumberger s’articule autour du thème de l’enfance et de l’adolescence, avec une forte connotation autobiographique, mais en cherchant à en extraire la dimension universelle.
« Ma peinture me permet d’imaginer un monde à part, lieu de toutes mémoires réunies, individuelles et collectives. L’imaginaire, mêlé à la mémoire, me permet de réinventer le temps, en me réappropriant des souvenirs enfouis de l’enfance, pour en faire un présent permanent par l’alchimie des pigments et de la matière picturale. » écrit-elle.
Ses aquarelles, fluides, spontanées et délicatement colorées, évoquent un miroir où flottent des images, fantômes de la psyché, cette personnification du principe de la vie, de l’âme, selon Aristote. Elles ont aussi cet aspect suspendu, inabouti, qui ouvre des espaces de liberté pour l’interprétation, pour la résurgence d’images mémorielles et pour le voyage mental.

La peinture de Raoul Scipioni-Guenancia appartient à un courant hyperréaliste narratif, sensuel et érotique, tel que le pratique Gérard Schlosser. Avec l’humour et la dérision en plus…
Ses Voyages imaginaires n’ont rien à voir avec les Voyages extraordinaires de Jules Verne… Encore que… Il y est question de moyens de transport figurés sur des fragments anatomiques de jeunes femmes visiblement passives et consentantes. On s’y déplace en avion, en train, en automobile, en bateau, en fusée, en motocyclette, en train, en ballon monté… mais, on le comprend vite, ce sont surtout de transports amoureux qu’il s’agit.
Raoul Scipioni-Guenancia nous met dans la peau de Culliver à Brobdingnag ou, plus certainement, dans celle du poète de La géante de Baudelaire : « Parcourir à loisir ses magnifiques formes ; / Ramper sur le versant de ses genoux énormes, / Et parfois en été, quand les soleils malsains, / Lasse, la font s’étendre à travers la campagne, / Dormir nonchalamment à l’ombre de ses seins, / Comme un hameau paisible au pied d’une montagne. »

Seb, sculpteur, cultive l’éclectisme comme un art de vivre.
Ses créations, en tôle pliée et découpée, traitent du paysage urbain et abordent la question de l’identité – ou de la perte d’identité – de l’humain qui y est plongé. Elles sont souvent présentées dans l’espace public, en confrontation directe avec des passants, êtres vivants, confrontés à d’autres soucis, vaquant à leurs activités ou flânant.
Les personnages y sont souvent réduits à l’état de logotypes ou de pictogrammes monumentaux, pris dans une dynamique arbitrairement figée, créant des situations cocasses ou ridicules.
Certaines de ses œuvres ont un caractère ludique qui les transforment en toboggans, en balançoires, en accessoires pour une aire de jeux pour les grands enfants que nous sommes tous.

Philippe Ségalard pratique une peinture résolument narrative, où les lumières et les ombres jouent un rôle de premier plan. Ses toiles dissèquent l’imperceptible de l’humain à travers sa relation au monde perceptible : espace, paysage, architecture… La figure du saltimbanque est, chez lui, la métaphore de l’Homme.
Pas de crainte, chez Philippe Ségalard, de se situer en dehors des courants ou de se plier aux interdits du modernisme et de la pratique picturale contemporaine. Il prend parti pour la puissance de vivre, de remettre l’Homme au centre de l’échiquier, au risque de paraître décalé ou ringard.
La contemporanéité n’intervient, dans sa peinture, qu’en tant que miroir dans lequel se reflètent, comme par effraction, nécessairement déformées, les images d’une fouille archéologique qui brise les frontières entre passé et présent, entre le moi et l’autre.

Cat Sirot compose des petites scénographies intimistes avec les poupées de son enfance, longtemps délaissées, oubliées, puis redécouvertes à l’âge adulte. Elle prend des photographies de ces mises en scène et s’en sert comme point de départ pour des peintures de format monumental.
Sa technique relève d’un hyperréalisme virtuose, proche de l’esprit pop par le décalage entre la démesure des toiles et la modestie des sujets qu’elles figurent. L’acidité des couleurs y contribue aussi.
Au-delà de la prouesse technique et de l’apparente accessibilité de leur thématique, les poupées de Cat Sirot sont plus graves qu’on ne pourrait le penser. Leurs yeux vides mais interrogateurs, leurs bouches figées sur des paroles inexprimables, leurs attitudes passives par obligation, leur nudité révélant une sexualité ambiguë, redisent et ressassent une histoire que l’on soupçonne indicible. À chacun de nous de la reconstruire…

SL (Stéphanie Ludet) insiste sur l’intime imbrication du dessin et de la peinture avec la vie sous toutes ses formes, même dans ses aspects les plus inattendus, les plus fugaces. C’est ce qu’elle veut exprimer dans ses œuvres, non sans poésie ni une douce touche de nostalgie qu’accentuent une palette de couleurs tendres.
Elle s’exprime : « Des visages, des corps surgissent d’une alchimie imprévisible des instants et de la mémoire conjugués. Je remarque parfois des liens étranges, voire énigmatiques, des liens qui souvent m’échappent. […] Le visage, le corps comme espace géopolitique me donnent à comprendre, à voir, l’origine, le devenir possible et entrevoir l’ombre du passé. J’ai l’impression de vouloir mettre en scène des personnages que tout, a priori, séparerait. J’assiste à une rencontre improbable. Je les entends. Ils se parlent, se regardent, se touchent. Cette main tendue a finalement rencontré l’Autre, mais qu’en est-il de leur rencontre ? »

Tibo Streicher voyage et glane des images aux quatre coins du monde. De retour dans son atelier cévenol, il les trie, les sélectionne, les délave, les recouvre de pigments, les révèle, les superpose pour créer des paysages improbables, intemporels, incitant à l’errance aussi bien mentale que physique.
Si son matériau de départ est essentiellement urbain, le résultat ne l’est pas toujours. On pourra découvrir, par exemple, des bancs de poissons nageant entre des gratte-ciel newyorkais, des arbres bourgeonnant devant un mur délabré, des nuées d’oiseaux survolant un désert apocalyptique post-nucléaire, mais aussi des passants dans une rue et les voyageurs sur les quais du métro, sous leurs pieds.
Chacun peut se laisser aller à ses propres divagations, sans être vraiment certain de ce qui vient tout juste de se passer ni de ce qui va prochainement advenir.

La figure humaine est toujours au centre des compositions de SylC, même si elle est souvent hybridée avec des corps d’animaux. Les regards sont éloquents, suppliants, dérangeants, dans un univers potentiellement hostile, mais figé comme dans un instant de grâce, baignant dans une sérénité intemporelle. Le regardeur est invité à se refléter dans ces miroirs chimériques qui lui renvoient une image d’un monde onirique, irréel dans sa thématique mais très présent par la matérialité de son traitement. Décontenancé, il ne sait plus décider ce qui relève de l’illusoire, du rêve ou du concret.
SylC soigne particulièrement les effets de patine et de glacis de sa peinture, pour créer un effet de distanciation, de dépaysement, souligner la planéité des images qu’elle propose. Elle évite ainsi au spectateur de sombrer trop vite dans la toile, d’être tenté de passer trop vite de l’autre côté du miroir.

La peinture de Michel Temim s’appuie sur un long et consciencieux apprentissage du dessin qui lui confère un aspect réaliste proche de l’esprit de la neue Sachlichkeit allemande. On peut aussi penser, du côté français, aux toiles d’un Clovis Trouille.
Dans un décor bien campé, dont les détails sont minutieusement rendus, se déroulent, comme des fables ou des contes inédits, des scènes de la vie urbaine, probablement banales, mais que le réalisme sourcilleux de l’artiste imprègne d’une étrangeté ambiguë. En les analysant bien, on y décèle une condamnation froide sans appel de l’absurdité, de la cruauté et de la solitude des relations humaines.
La construction de la composition, avec sa perspective conique, déforme les sujets et place le spectateur en position d’observateur – et, partant, de témoin – unique ce qui se trame silencieusement.

Erwann Tirilly s’inspire de l’iconographie religieuse, de la psychanalyse et de l’univers médical pour construire des images décalées quelque peu déjantées. Il jette son dévolu sur des éléments empruntés à l’art sacré qu’il associe à d’autres symboles, plus banals, pour composer de très contemporaines icônes hybrides, étranges, ambiguës, cauchemardesques, parfois. Il y est question de mouvement, de chute, de bascule, d’ascension et de vertige.
La succession de ces images déroule une sorte de film intérieur et mystérieux, dans lequel un personnage au crâne rasé, en proie à d’incessantes mutations, symbolise simultanément l’artiste et l’humanité. Expression d’une mythologie toute personnelle et de problématiques universelles, ces scènes dévoilent, par fragments discontinus, organisés en rhizome, une histoire plus globale, dont une bonne partie reste à écrire… Par l’artiste et/ou par le spectateur…

Nadine Touzé sculpte et assemble. Ses œuvres sont joviales, colorées, invasives, proliférantes, déjantées, évoquant le monde d’une enfance moins innocente qu’on pourrait le penser au premier abord.
Ses triptyques rappellent les retables baroques. Ils ne sont pas peuplés de saints ni de scènes édifiantes, mais de figures bigarrées, mêlant, dans un raccourci saisissant, plusieurs siècles d’histoire de l’art, depuis la statuaire grecque et la peinture de la Renaissance italienne jusqu’aux boîtes de merde d’artiste de Manzoni et des jouets en matière plastique.
Le résultat est décapant, corrosif et hilarant. Nadine Touzé nous oblige à revoir nos préjugés sur l’art prétendument sérieux et sur la façon dont est transmise et perpétuée la tradition picturale.

Teresa Tyszkiewicz est une monomaniaque de l’épingle. Depuis plusieurs décennies, elle les met en œuvre sur des toiles, dans des objets, dans des films, sur son visage ou sur le reste de son corps.
De ses œuvres relevant de la pratique du body-art, elle écrit : « J’habille mon corps aux couleurs de mon imagination. J’utilise divers matériaux comme le coton, le grain, les épingles, le métal… qui sont autant de révélateurs permettant de matérialiser une émotion, un besoin. Le mouvement du visage et du corps en relation avec un matériau révèle mon intériorité. Je ne privilégie en aucun cas l’esthétique dans mon travail. Ce qui m’importe le plus est de faire ressortir une image de soi. Je considère mes créations comme un autoportrait relevant de l’introspection. »

Jean-François Veillard s’est consciencieusement appliqué à désapprendre ce que ses enseignants lui avaient transmis aux Beaux-Arts d’Orléans et de Paris.
Expressionniste dans l’âme, il ne veut pas qu’une technique trop maîtrisée occulte son geste ou son intention. Ce qui l’intéresse avant tout, c’est l’Homme et ses travers, la chair bien présente, parfois sanguinolente. Ses mises en scène tragico-comiques relèvent de la commedia dell’arte, avec ses masques et son univers où certaines formes de déviance sont tolérées.
L’esprit surréaliste ne lui est pas étranger. Ses compositions mêlent des images appartenant à des univers normalement disjoints, entretiennent l’anachronisme et les hiatus visuels, cultivent un joyeux délire, une folie qui trouve ses racines dans des contes et des légendes populaires. Plusieurs niveaux de récit s’entrechoquent, faisant fi du bon sens et de la structure narrative conventionnelle.

Ced Vernay est un artiste pointilliste. Mais, le point ayant disparu, remplacé par le pixel, il s’est fait artiste pixelliste.
De fait, ses pixels sont des confettis obtenus en découpant des magazines avec un emporte-pièce. Essentiellement portraitiste, il part d’une photographie d’une personne connue, d’un proche ou d’un anonyme, la met au carreau puis, minutieusement, reconstitue l’image initiale en collant les petites pastilles sur la toile.
Ced Vernay est indéniablement coloriste, mais sa palette est une boite de confettis et son pinceau une pince à épiler… Tant de minutie, de patience et de méticuleuse précision pourraient faire craindre un résultat dans lequel la technique prime sur l’expression. Il n’en est rien, à l’instar des œuvres de ses grands devanciers en pointillisme, ses pointilleux efforts donnent à ses portraits une présence vibrante qui relègue la prouesse technique au second plan.

Les Suites de Ludmila Volf sont des polyptyques modulables qui se développent selon un processus rhizomatique. Leur combinatoire produit de multiples possibilités et un plus grand nombre de pistes de lecture. Chaque accrochage, matérialisation changeante d’une vision mentale fugace, devient une scénographie qui évoque une œuvre désintégrée et recomposée. Les vides et les espaces séparant les pièces créent une tension presque aussi signifiante que les peintures elles-mêmes.
Les composantes de ce puzzle indécis et mouvant sont des toiles montées sur des châssis rectangulaires, en forme de T ou de L, qui peuvent relever de l’abstraction pure, emprunter au répertoire du papier peint décoratif, puiser dans des albums de photographies familiales ou copier des modèles de la peinture classique. La dimension ludique est toujours présente, dans ce work in progress condamné d’emblée à ne connaître aucun aboutissement… À moins que chacune de ses configurations potentielles ne soit lui-même un aboutissement, un peu à l’image de la vie et de ses étapes successives dont on a toujours peur de dire que l’une d’elles est la dernière…

Julien Wolf, jeune artiste formé à l’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg, s’est vite voué à la peinture.
Sa pratique s’inscrit dans la descendance d’un expressionnisme matiériste, peuplé de personnages tour à tour burlesques et inquiétants. Sa gamme chromatique reste globalement sourde, avec des éclats de rouges ou de jaunes qui focalisent le regard, concentrent l’attention du spectateur et la déstabilisent. Ce sont des sortes d’exutoires à une violence latente qui ne demande qu’à s’exprimer, à sauter à la gorge du regardeur pour l’engloutir dans le tourbillon de la farce grotesque et démesurée qui se déroule sur le plan de la toile de lin, souvent laissée libre pour faciliter ce rapt visuel, cette prise d’otage sans espoir de retour.

Les peintures de la série Les Secrets d’Élisabeth von Wrede recèlent effectivement un secret.
Sur chacune de ces grandes toiles carrées, un message a été inscrit, avant d’être recouvert par un savant tuilage d’écailles colorées où le blanc est structurant, maçonnant le chatoiement des couleurs sous-jacentes.
Le rythme général de l’œuvre s’apparente à celui d’une partition musicale, avec ses lectures verticales et horizontales, ses registres et ses barres de mesure, ses syncopes et ses altérations. Il tient aussi du grimoire où des strates de messages successifs se sont superposées, chacune modifiant la précédente au point d’en occulter le sens initial. On peut aussi l’assimiler à un processus mémoriel, dans lequel des images mentales récentes se superposent à d’autres, les occultent ou les transforment partiellement ou totalement.

Laura Zimmermann pratique une peinture sans concession.
Ses tableaux exploitent les éléments de l’iconographie populaire de notre temps, qu’elle traite rapidement en feignant une facture maladroite, vite faite, à l’instar du street art. Elle dévoie ces images banales et insignifiantes en leur conférant une dimension universelle, génératrice, selon les séries, d’angoisse et de malaise ou de tendresse et d’empathie.
Elle peut en effet représenter des enfants jouant avec des armes de guerre (série La violence ordinaire) ou des bambins souriants, dans des attitudes plus conventionnelles (série The Kidz).
Laura Zimmermann peint ses toiles à même le sol, attaquant leur surface avec des gestes qui s’apparentent à une attaque du support. Cette brutalité dans l’exécution révèle la violence souterraine, mêlée de fragilité, de ses sujets.

Quelques acquisitions récentes




Sébastien
PIGNON
Claude
BRIAND-PICARD
Cécile
WAUTELET


À ne pas rater...




macparis
du 27 au 30 novembre 2014
Espace Champerret
6 rue Jean Oestreicher – 75017 PARIS


Christophe Robe
peintures et dessins récents

du 13 septembre au 6 novembre 2014
Galerie Réjane Louin
19 rue de l’Église – 29241 LOCQUIREC


Bernard Cousinier
du 27 septembre au 29 novembre 2014
L’H du Siège
15 rue de l’Hôpital du Siège – 59300 VALENCIENNES


Les 111 des Arts
du 14 au 22 novembre 2014
Mairie du VIIIe arrondissement
3 rue de Lisbonne – 75008 PARIS




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