Le poil à gratter… 
Lettre d’information de Cynorrhodon – FALDAC  
www.cynorrhodon.org  


N° 7 – avril 2013  

  ISSN 2264-0363
 

Lettre ouverte
au chef de la tribu des Kamilaroi
[*]









Grand et vénéré chef.

    Gamil ngaya gamilaraay guwaalda.[1]

    Excusez-moi de ne pas vous écrire dans votre belle langue dont l’origine remonte à Baiame, le grand ancêtre, à son épouse Birrahgnooloo et à leur fils Daramulum. Je n’ai trouvé personne qui puisse me l’enseigner. Je vous écrirai donc en français, un dialecte parlé aux antipodes, dans la tribu des Français, un peuple revêche et difficile à guider, qui eut, en son temps, une grande culture et de grands artistes.

    Comme je ne sais plus à qui m’adresser dans ma tribu, je viens vers vous pour vous demander conseil sur la façon de garder vive la pratique des arts dans ma tribu. On m’a dit, en effet, que vous êtes arrivé à faire revivre la culture de votre grand peuple, laquelle remonte aux temps de la création du monde, quand Baiame, dieu du ciel, de la vie et de la mort, de la pluie et des shamans, s’accoupla à Birrahgnooloo, déesse-émeu de la fertilité et des eaux, pour donner naissance à Daramulum, l’unijambiste qui peut changer d’apparence à son gré. Vos opinions sages et avisées me seront donc précieuses.

    Voici, je vais commencer par vous expliquer ce qu’il en est des arts plastiques dans la tribu des Français, pour que vous puissiez me conseiller en connaissance de cause.

Les artistes – la précarité au quotidien
Même si le mythe de l’artiste maudit, plongé dans la misère noire, a vécu, il n’en reste pas moins que la situation de la quasi-totalité des artistes plasticiens est précaire, voire très précaire. Un des grands artistes français, dont les œuvres sont présentes dans la plupart des grands musées d’art contemporain en France et à l’étranger, me déclarait récemment que, s’il n’avait pas eu son poste d’enseignant à l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, il aurait probablement cessé de peindre. On imagine alors ce que peut être la situation d’artistes n’ayant pas de galerie, montrant peu ou pas leur travail et ne faisant l’objet d’aucune couverture médiatique.

    Contrairement aux artistes des spectacles vivants, les plasticiens ne bénéficient d’aucun régime d’intermittence. Ils ne le souhaitent pas, d’ailleurs. La plupart d’entre eux exercent donc une autre profession pour assurer leur subsistance et pour bénéficier d’une couverture sociale. L’enseignement en attire beaucoup, mais certains pratiquent d’autres métiers plus ou moins éloignés de leur pratique artistique : peintre en bâtiment, gardien de musée, vigile, standardiste de nuit, concepteur de site Internet, photographe de mode, cuisinier, vendeur en magasin, conseiller en communication ou en stratégie, élu local ou régional, ingénieur de recherche, facteur… L’équilibre entre le travail rémunérateur et la création est souvent, pour eux, très difficile, le gagne-pain finissant par prendre tellement de temps et d’énergie qu’il étouffe la production artistique. Certains essaient de vivre du RSA, en l’attente de jours meilleurs. Ceux qui n’ont pas d’activité parallèle sont trop souvent amenés à déclarer un montant de ventes supérieur à la réalité pour atteindre le plancher ouvrant droit à une couverture sociale.

    Pour travailler, il faut un atelier. Dans les métropoles, les loyers sont exorbitants. Les ateliers gérés par la collectivité, trop peu nombreux, sont attribués par des processus opaques selon des critères qui restent aussi peu documentés qu’imprévisibles. On constate aussi que certains de ces ateliers sont, du fait de baux mal rédigés, occupés par des ayants-droit d’artistes décédés n’ayant aucune pratique artistique. On constate donc un exode des artistes vers la province, l’ouest et la région nantaise présentant, pour beaucoup d’entre eux, un attrait irrésistible. Ceci a pour contre-partie l’éloignement de Paris où, qu’on le veuille ou non, les carrières artistiques se font encore.

    Quand l’existence est assurée, il reste à montrer son travail. Ce point est devenu la préoccupation majeure des artistes, jeunes ou aînés. Les galeries saturent et ont tendance à resserrer le nombre d’artistes qu’elles exposent. Quand on sait que des créateurs contemporains essentiels n’ont pas ou plus de galerie à Paris, on imagine combien la chose doit être difficile pour des artistes à la réputation moins établie ou produisant des travaux plus difficilement vendables. Certains ont décidé de promouvoir eux-mêmes leur production, parfois via le canal Internet, mais cette activité, pour laquelle ils sont peu préparés et mal formés, se fait toujours au détriment de leur activité artistique.

    Plus dur, encore, le manque de réceptivité de nos contemporains aux arts plastiques. Contrairement à la musique, par exemple, où un quidam reconnaîtra facilement son incapacité à juger d’une composition musicale, les arts plastiques appellent des jugements à l’emporte-pièce, d’autant plus catégoriques que le spectateur est incompétent en la matière. Les « mon enfant de trois ans en ferait autant » et « ça représente quoi ? » sont encore monnaie courante, et pas toujours chez les gens les moins instruits. Qui fera comprendre à ces personnes obtuses que l’art est un langage, qu’il s’apprend et que les bonnes questions à poser, à se poser, sont plutôt : « qu’est-ce que l’artiste a voulu exprimer ? », « qu’est-ce que cette œuvre dit ? » ou « qu’est-ce que je ressens devant cette œuvre ? »

    Mais, en cette matière, médias, institutions et enseignement conspirent activement à la déculturation des Français, jeunes et vieux, pour les faire entrer dans leur modèle de pensée unique.

Institutions, enseignement, médias – la machine à décérébrer
L’Institution se trompe depuis plus de trois siècles. Elle a toujours ignoré ou méprisé les créateurs de son temps, jugés trop novateurs et dangereux pour l’ordre public. De Chardin[2] aux surréalistes, en passant par les impressionnistes, les fauves, les cubistes, les abstraits…, l’Institution a raté tous ses rendez-vous avec l’Histoire, privilégiant des artistes médiocres depuis longtemps oubliés au détriment de ceux qui ont fait leur époque. Même si le nouvel académisme est devenu un anti-académisme, on peut affirmer, sans grand risque de se tromper, que le malentendu perdure, que les artistes mis en avant aujourd’hui par les tenants de l’art officiel sont les Couture, les Bouguereau, les Meissonier ou les Cabanel de demain.

    Sans vouloir juger de la qualité du travail de Jean-Marc Bustamante, comment légitimer sa sur-représentation dans les collections publiques ? Comment justifier la vacuité[3] de la plupart des travaux des lauréats – aussi vite oubliés qu’idolâtrés, d’ailleurs – du Prix Marcel Duchamp ? Comment expliquer l’étrange similitude de la plupart des collections des FRAC ? La réponse est simple. Terrorisés par l’idée d’être jugés par la postérité à l’aune de leurs anciens, les décideurs adoptent un comportement grégaire, à la mode des moutons de Panurge[4], pensant se dédouaner individuellement en rejetant la responsabilité sur le groupe, sur la collectivité : « c’est pas moi, c’est les autres. »

    Si l’on ajoute à cette lâcheté le poids des directives pressantes de rentabiliser les grandes expositions en faisant des entrées plutôt qu’en cherchant à cultiver la qualité et la diversité, on en arrive à la multiplication de ces manifestations dont la qualité principale réside dans la communication faite autour d’elles et dans les produits dérivés vendus. C’est ainsi que l’on présentera de préférence des expositions sur les impressionnistes, déclinés à toutes les sauces, sur Edward Hopper, artiste médiocre et surfait, ou sur les grands noms du passé alors que des grands artistes de la seconde moitié du XXe siècle attendent encore la consécration par une grande exposition nationale : Pierre Tal-Coat, Charles Lapicque, André Marfaing, Gérard Schneider, Simon Hantaï, Michel Parmentier, Jean-Pierre Pincemin, François Arnal… pour n’évoquer que quelques-uns des disparus, ou Genevière Asse, Véra Molnar, Pierrette Bloch, Judit Reigl, Ode Bertrand… pour ne citer que quelques femmes, heureusement encore bien vivantes. Il est vrai que de telles expositions ne permettraient pas d’afficher les chiffres de fréquentation obtenus avec Chagall, Monet ou Picasso… Tous artistes respectables, mais pour qui une exposition supplémentaire ne contribuera en rien à la renommée et dont les spectateurs connaissent déjà, avant même la visite, les œuvres qui seront exposées.

    L’institution, relayée par la presse et les médias, est obnubilée par le mauvais classement[5] des artistes français à l’échelle internationale. Cinq Chinois, quatre Étasuniens (dont un décédé : Jean-Michel Basquiat) et un Britannique dans les dix premiers. Le premier Français – Robert Combas – est au 108e rang et le deuxième – Philippe Pasqua – au 241e… Comment interpréter un classement dans lequel l’immense artiste qu’est Gerhard Richter ne figure même pas parmi les 500 premiers ? Une partie de la réponse est probablement à trouver du côté de la forme de masochisme, typiquement français, qui dénigre les artistes nationaux au profit des étrangers. Sans tomber dans un nationalisme artistique aussi stérile que dangereux, on devrait se poser la question de savoir pourquoi, en Allemagne, les musées et les Kunsthalle présentent une majorité d’artistes allemands, alors que leurs équivalents français ne jurent que par les Allemands, les Américains, les Britanniques…

    À l’instar d’Andy Farcy qui, de 1919 à 1949, bravant les oppositions et les quolibets[6], fit du musée de Grenoble une plate-forme avancée de l’art de son temps, certains responsables culturels tentent, non sans subir de nombreux reproches et des critiques, de se démarquer du conformisme consensuel ambiant. Olivier Delavallade est de ceux-ci. Les quinze ans qu’il passa à la tête de la manifestation L’Art dans les chapelles ont montré qu’il était possible d’intéresser les populations de terroirs essentiellement agricoles à l’art contemporain, de les faire se mobiliser pour des artistes et des œuvres de notre temps, sans, pour autant, céder à la facilité. Depuis qu’il est devenu directeur du Domaine de Kerguéhennec, il a réussi l’exploit de concilier une programmation qui réunit des grands anciens, des artistes confirmés et, par le biais de résidences, des jeunes dont certains seront les grands de demain. Là aussi, avec une exigence de qualité, sans concession à une mode éphémère, mettant en avant des artistes et des œuvres qui ont quelque chose de pertinent à dire… Le tout, bien entendu, sans écho significatif dans la presse régionale ou nationale…

    À la limite entre Institution et initiative locale, les centres culturels municipaux proposent une programmation souvent intéressante. Les plus importants sont situés en région parisienne. Le Centre Camille-Lambert de Juvisy-sur-Orge, dirigé par François Pourtaud, ou la MACC de Fresnes, sous la direction de Marcel Lubac, sont parmi les plus novateurs. Ces centres restent cependant relativement fragiles, car ils sont très dépendants des arbitrages financiers des collectivités locales. Ils souffrent aussi d’une très faible fréquentation du fait de leur éloignement de Paris et de leur mauvaise desserte par les transports en communs. Enfin, la qualité de leur programmation repose uniquement sur leur dirigeant et peut donc fluctuer dans le temps, au fil des mutations de personnes, comme on l’a constaté, par exemple, à Gennevilliers, après le départ en retraite de Bernard Point. Beaucoup de ces centres développent d’importants programmes de sensibilisation des scolaires, ce qui fait d’eux de très précieux supplétifs aux carences du système éducatif officiel. Certains ont une politique éditoriale soutenue en éditant des catalogues pour leurs manifestations. D’autres proposent des résidences à de jeunes artistes. D’autres encore, comme à Vitry-sur-Seine, sous la férule de Catherine Viollet, décernent un prix très apprécié des jeunes artistes, car il est associé à une exposition personnelle, à l’édition d’un catalogue et à un achat par la collectivité locale. Il en est de même du Salon de Montrouge, dont la manifestation annuelle, malgré des hauts et des bas, reste un rendez-vous annuel incontournable de la création plastique contemporaine.

    La critique d’art est, depuis toujours, intimement liée à la création artistique. Son relais naturel devrait être la presse écrite mais, depuis bien longtemps, celle-ci, poussée par des impératifs de rentabilité, s’est désintéressée des manifestations peu fréquentées ou en dehors des courants à la mode. Il faut flatter le lecteur et ne pas susciter de polémique. Le consensus, même mou, est de rigueur. Oubliée depuis longtemps l’époque où un Jean-Marie Dunoyer nous faisait découvrir, dans ses rubriques pour le journal Le Monde, de nouveaux artistes, résultats de visites d’ateliers ou de galeries peu fréquentées, s’enthousiasmait ou nous faisait part de ses déceptions. Tout au plus, les galeries auront droit, une fois par semaine, à quelques lignes, reprenant en les condensant, au point de les rendre grotesques, le contenu des dossiers de presse d’expositions que le signataire de l’articulet n’a probablement pas visitées.

    Les textes dans les catalogues d’expositions constituent un autre univers où la critique artistique peut se déployer. On y trouve un peu de tout, depuis les textes passe-partout[7] qui, en y changeant quelques mots, pourraient s’appliquer à un autre artiste, jusqu’à ceux qui sont d’un abscons tel que l’on renonce très vite à tenter d’en percer les arcanes. Le juste milieu est rare : éclairer sur l’œuvre, donner son point de vue personnel – nécessairement et heureusement subjectif –, tout en maintenant l’intérêt des néophytes comme des spécialistes. Karim Ghaddab est probablement, parmi les jeunes critiques, celui qui porte au plus haut niveau ces exigences intellectuelles, dans un style d’une rare limpidité. Exploitant le canal Internet, un groupe de jeunes normaliennes, regroupées autour d’Émilie Bouvard et du site Portraits – la galerie, développe aussi une critique artistique exigeante au profit de jeunes créateurs.

    Les revues et magazines d’art pourraient aussi constituer un terreau propice à la critique et à la promotion d’artistes contemporains. Malheureusement, les coûts de production et de distributions créent des contingences économiques qui poussent les rédacteurs en chef à privilégier les articles qui font vendre. Et, en la matière, les recettes mises en œuvre sont les mêmes que celles qui font venir les visiteurs aux expositions. Chagall, Soutine, Picasso, Matisse, Soulages font mieux vendre que Maëlle Labussière, Olivier Michel ou Erwan Ballan. Quant aux textes, ils passent trop souvent derrière les illustrations et ne sont lus que par une minorité des abonnés. Là aussi, Internet pourrait offrir une solution pour s’affranchir de l’essentiel des coûts de production et de distribution, mais les quelques tentatives en la matière n’ont pas eu le succès escompté ou se sont soldées par un échec.

    Le problème, tout comme pour les expositions, est qu’il faut un public et, là, malheureusement, il n’existe pas. Ou plus… La réduction à la portion congrue des humanités dans les programmes du secondaire a fini par éliminer toute appétence pour des connaissances et des savoirs qui ne collent pas strictement aux exigences du programme et des examens. À titre d’exemple, il y a quelques années, j’étais amené à commenter La Cène de Philippe de Champaigne à un groupe d’étudiants. Une des membres du groupe, étudiante en maîtrise d’histoire de l’art, voulant probablement paraître cultivée devant ses camarades, a pris la parole pour expliquer que cène était la forme orthographique ancienne de scène. Je l’ai fusillée du regard pour ne pas l’humilier. Elle a balbutié quelques propos incohérents pour se dédire, mais je ne suis pas sûr qu’elle a compris sa bévue. Le même jour, ce même groupe, interrogé sur qui régnait en France pendant la vie de Nicolas Poussin, dont j’avais donné les dates de naissance et de décès, m’a fourni un spectre de réponse allant de Louis XI à Napoléon III, en omettant, bien entendu, Henri IV, Louis XIII et Louis XIV… Inutile de dire, dans ces conditions, combien il est difficile de commenter les scènes bibliques ou mythologiques de ce peintre sans une longue et indispensable explication préalable du sujet figuré.

    La chose est triste à dire, mais il faut s’y résigner ; il n’y a pas ou très peu de demande pour l’art et encore moins pour l’art contemporain. La seule façon de créer le besoin, c’est l’éducation. Depuis des années, le débat sur l’introduction de l’histoire de l’art parmi les disciplines obligatoires enseignées dans le primaire et dans le secondaire est d’actualité, mais aucun progrès n’a été fait, si ce n’est à rebours puisque les cours d’histoire ont été marginalisés dans la plupart des filières réputées nobles, celles ouvrant les portes vers des métiers où la crise de l’emploi est moins critique. Il est vrai que ces disciplines ouvrent l’esprit, forcent à réfléchir, n’imposent pas de lecture univoque, développent le sens critique, fragilisent la pensée unique, remettent en cause le prêt-à-penser dont rêvent tous les totalitarismes…

    Il y a donc urgence à agir si ce n’est pour les générations actuelles, du moins pour celles à venir. L’enjeu n’est rien de moins que recréer un besoin et une appétence pour les arts plastiques et, plus singulièrement, pour les œuvres de nos contemporains.

Les collectionneurs – marginalisés et caricaturés
Les médias donnent du collectionneur une image caricaturale. Richissime, avec un intérêt exclusif pour les artistes à la mode, animé par le seul souci – revendiqué ou non – du placement spéculatif et de la plus-value, ces personnes ne sont guère présentées de façon empathique au grand public. Ils sont aussi souvent insidieusement proposés à l’opprobre général voire à la vindicte de lecteurs ou d’auditeurs qui ne comprennent pas que l’on puisse gâcher son argent dans des activités aussi futiles et peu génératrices de richesses. Sans vouloir porter de jugement sur les quelques grands collectionneurs qui sont visés par ces portraits parodiques, il importe de savoir qu’il a toujours existé un plus grand nombre de collectionneurs, plus modestes dans leurs moyens, dans leurs appétits et dans leur désir d’exhiber leurs trésors comme un tableau de chasse. Ce sont les pourvoyeurs des fonds des collections publiques, une ou deux générations après leur disparition. Les exemples sont nombreux, citons, par exemple Geneviève et Jean Masurel, dont la collection forme le noyau dur des collections du Musée de Villeneuve-d’Ascq[8], Denise et Pierre Lévy à Troyes ou le docteur Maurice Girardin, chirurgien-dentiste, au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris… Plus récemment Michael Werner dans ce même musée. Certes, ces généreux donateurs n’étaient pas des smicards et disposaient de revenus significatifs, mais bien en deçà de ceux des magnats qui, de nos jours, alimentent exclusivement les chroniques relatives aux collectionneurs dans les médias.

    Deux vérités s’imposent pourtant avec une évidence telle que l’on s’étonne de ne pas les voir plus souvent affirmées haut et fort.

    La première, c’est que ce sont les collections privées d’aujourd’hui qui feront les richesses futures des collections publiques. Pour ceux qui en douteraient, il suffit de consulter les cartels de nos grandes collections nationales et de noter l’origine des œuvres. Bien peu nombreux sont les achats publics… Et de moins en moins, au fur et à mesure que l’on s’éloigne dans le temps. Sans les collectionneurs privés, il n’y aurait que très peu de Picasso[9] des premières périodes ou de Mondrian[10] dans nos musées… Pour ne citer que deux noms d’artistes majeurs du XXe siècle, négligés, en leur temps, par la mode. Le catalogue des collections du Musée national d’Art moderne est disponible via Internet. Sa consultation est plus qu’édifiante sur l’absence de pertinence et de discernement de la plupart des achats effectués qui encombrent inutilement les réserves.

    La seconde, c’est que pour être collectionneur, il n’y a pas besoin d’être très riche, ni même riche. L’exemple le plus frappant est celui du couple de fonctionnaires new-yorkais Herbert et Dorothy Vogel qui, avec des revenus plus que modestes[11], vivant dans un petit deux-pièces à loyer modéré, a constitué une collection de 4 800 œuvres d’art conceptuel et minimaliste, qui font aujourd’hui la fierté d’un grand nombre de musées étasuniens. C’est, pour ces collectionneurs comme pour bien d’autres, un choix de vie, à contre-courant des tendances consacrées par le plus grand nombre, privilégiant l’être plutôt que le paraître. C’est vivre sa passion en ignorant le qu’en-dira-t-on, décider que cohabiter avec une œuvre d’art est plus important que regarder des émissions de télévisions débilitantes sur un grand écran plat, aussi vite démodé qu’acheté, admettre que conduire un véhicule de haut de gamme à forte cylindrée ou frimer restent des comportements peu gratifiants et toujours frustrants. On trouvera toujours plus frimeur que soi-même…

    Le véritable collectionneur vit une passion. Il agit par coups de cœur, ne revend des œuvres qu’à regret, peut paraître irrationnel et incohérent, ne cherche pas à justifier ses choix, s’applique à comprendre – à s’approprier – ses artistes au-delà de leurs créations, n’a aucune visée spéculative, regrette même souvent que certaines œuvres deviennent inaccessibles quand la cote d’un de ses artistes augmente… Il est peu exhibitionniste de nature. Quand il révèle une partie de sa collection, c’est pour promouvoir ses artistes et non pas mettre en valeur son action, son savoir ou son bon goût.

    Chez le véritable collectionneur la passion est doublée d’une certaine forme d’idéalisme ancré dans une conviction forte. Il sait que l’art est indispensable à la société. La volonté de changer la société, de la rendre plus ouverte, plus tolérante, est au cœur de son action. Il est convaincu que l’art en général – et l’art contemporain, plus spécifiquement – est un remarquable moyen de lutte contre l’exclusion, contre la pensée unique, contre le sectarisme et l’obscurantisme. Il privilégie les œuvres porteuses de sens multiples, propres à des interprétations variées, qui dépassent bien souvent le propos initial de l’artiste. Il a souvent l’impression de se battre contre des moulins à vent mais ne renonce pas car il sait que le temps est son meilleur allié.

    Ceci étant dit, le collectionneur vit mal. Marginalisé, ridiculisé ou considéré comme un doux dingue par ses contemporains, il est pourchassé par l’État, soupçonneux devant tant de désintéressement en un monde qui ne l’a jamais aussi peu cultivé. Dénoncé par les compagnies d’assurance qui ont l’obligation de déclarer les objets de collection qu’elles couvrent, menacé à tout moment d’être taxé à l’ISF sur un patrimoine dont la valeur courante est plus qu’incertaine et la valeur future imprévisible, assuré de voir sa collection détournée, à terme, par des droits de succession confiscatoires, assuré qu’il lègue à ses héritiers plus de problèmes à gérer que de valeur vénale, il est amené à gérer, de son vivant, parfois dans la précipitation, le futur de sa collection. Les dons, la création d’une fondation ou la dispersion en vente aux enchères sont autant de solutions qui s’offrent à lui, sachant que cette dernière option a trop souvent pour contrecoup de faire du tort à ses artistes dont la cote, souvent mal assurée, s’effondre devant le soudain afflux d’œuvres, souvent de qualité, sur le marché.

    Il faudrait donner du temps au temps, laisser l’Histoire jouer son rôle de pacification du marché, d’élimination du secondaire au profit de l’essentiel. Cela peut prendre une ou deux générations. Une bonne façon de faciliter ce rôle, serait d’exonérer de droits de succession les œuvres d’artistes vivants ou récemment décédés. De toute façon, l’État n’y perdrait rien. Les pièces de qualité finiront toujours dans ses collections. Il y gagnerait sûrement de ne pas stocker dans des réserves poussiéreuses des œuvres acquises ou acceptées en dation sous la pression d’une mode éphémère.

    Notons que, chez nos voisins, en Allemagne ou en Belgique[12], où l’histoire de l’art continue à être au programme dans l’enseignement primaire et secondaire, les collectionneurs sont plus nombreux qu’en France et ne sont pas considérés comme des marginaux ou comme des excentriques. Le marché de l’art y est aussi plus florissant. Mais pour faire évoluer ceci, il faudra attendre une génération, que les jeunes ayant profité d’un enseignement de l’histoire de l’art à l’école, au collège et au lycée atteignent la trentaine, âge auquel ils commencent à avoir une certaine aisance économique.

Les galeries – un apostolat
Les galeries sont les intermédiaires naturels entre les artistes et les collectionneurs. On distique, traditionnellement, celles du premier marché, qui prennent en charge un artiste, en assurent la promotion et vendent des travaux sortant de l’atelier, et celles du second marché, qui commercialisent des œuvres qui ont déjà été vendues une première fois[13]. Aujourd’hui, la plupart des galeries pratiquent simultanément les deux activités.

    Le spectre de la typologie des galeries est très étendu, depuis de grosses structures, avec plusieurs points de vente et de nombreux employés, jusqu’à des entreprises individuelles gérées par une seule personne qui ne se verse pas nécessairement un salaire. Les grandes galeries sont fortement dépendantes des achats de l’Institution et des grands collectionneurs spéculateurs. Les plus petites sont de santé fragile et disparaissent souvent après quelques années. Idéalement, pour survivre, les galeries qui promeuvent la création auront un portefeuille avec quelques locomotives reconnues dont les œuvres se vendent bien et des artistes plus jeunes dont la notoriété est en cours de construction.

    Les galeries vouées à la découverte de nouveaux artistes sont essentiellement parisiennes, avec des exceptions notoires à Lyon, à Marseille, à Toulouse, à Rennes… Le cas des galeries AL/MA[14], à Montpellier, dirigée par Marie-Caroline Allaire-Matte, et Réjane Louin, à Locquirec, provinciales et essentiellement dévolues à la découverte et à la promotion de jeunes artistes, reste exceptionnel à bien des titres. Leur attitude est d’autant plus méritoire que leurs dirigeantes s’imposent une rigueur dans leurs choix, alors qu’elles savent fort bien que, du fait de l’inculture ambiante, des travaux de moindre qualité, moins exigeants, se vendraient beaucoup mieux. Certains galeristes savent fort bien, quand ils planifient certaines expositions qui leur tiennent à cœur, que les ventes ne seront pas au rendez-vous.

    Il est évident que, pour beaucoup de galeristes du premier marché, leur métier est l’accomplissement d’une passion, au service de l’art et des artistes, loin de toute préoccupation de bénéfice ni même de rentabilité. Un apostolat bien plus qu’une activité commerciale. Un galeriste de la rue de Seine m’a avoué, après plus de dix ans d’activités, qu’il venait seulement de se verser un salaire pour la première fois. Peu étonnant que, dans ces conditions, les galeries les plus prometteuses disparaissent souvent trop vite.

    Malgré toutes ces bonnes volontés, certains artistes, et non des moindres, n’ont pas ou plus de galerie. Comment admettre que des artistes contemporains aussi indiscutables et incontournables que Guy Le Meaux, Dominique De Beir, Claude Briand-Picard, François Jeune, Erwan Ballan, Janos Ber ou Jean-Louis Gerbaud, pour n’en citer que quelques-uns, ne sont représentés par aucune galerie parisienne[15] ?

    Ce n’est pas par absence de bonne volonté, mais les galeries sont confrontées à un manque d’acheteurs potentiels, de collectionneurs. Et, ce, d’autant plus que ces derniers sont périodiquement désignés, par les parlementaires de tous bords, comme la prochaine cible d’une prétendue « justice fiscale », une justice en forme de guillotine, celle qui décapita Lavoisier, par exemple. Il faut, en effet, être un peu fou pour prendre le risque de se voir imposer sur la base d’un patrimoine qui ne rapporte rien, dont la plus-value est d’emblée négative[16] et dont la valeur réelle est d’autant plus indéterminable que les œuvres sont d’artistes contemporains vivants.

    Dans un pays où la recherche de niches fiscales est devenue un sport national[17], j’avais suggéré, il y a déjà quelques années, à un de nos grands-argentiers, de donner un avantage fiscal aux acheteurs d’œuvres d’artistes vivants. J’avais proposé d’octroyer un avoir fiscal de la moitié du montant de la TVA sur la marge pour la première vente d’une œuvre d’un artiste vivant, quitte à majorer, s’il le fallait, pour financer cette mesure, le taux de la TVA sur la vente d’œuvres du second marché.

    Je sais que l’heure n’est pas à la création de nouvelles niches fiscales, mais pourquoi l’État ne consentirait-il pas pour les arts plastiques un effort probablement moindre que celui qu’il fait pour l’industrie cinématographique ? La réponse est simple : le cinéma fait partie des panem et circenses du monde contemporain. Pas les arts plastiques… Encore un effet de cette politique de déculturation ; le cinéma est populaire tandis que l’art contemporain est élitiste… On pourrait aussi le formuler de façon moins politiquement correcte sous la forme ; le cinéma fait gagner des voix aux élections, l’art contemporain risque d’en faire perdre… Ou bien encore, plus prosaïquement ; le cinéma est une industrie concentrée qui peut s’exprimer haut et fort, tandis que les plasticiens sont éparpillés et leurs revendications ne font jamais trop de bruit…

Les associations – indispensables mais fragiles
Les associations jouent, pour beaucoup d’artistes, le rôle que les galeries ne peuvent pas ou ne veulent pas jouer. Sans but lucratif, au service des artistes, leur principal objectif est de permettre aux plasticiens de montrer leur travail. Certaines offrent aussi des possibilités de création en proposant des résidences ou des ateliers temporaires. Ces structures sont gérées par des bénévoles qui y mettent beaucoup de passion et y consacrent la quasi-totalité de leur temps libre. C’est cette énergie qui en fait la force. Elles ne sont, en aucun cas, concurrentes des galeries commerciales mais servent plutôt de passerelles vers elles. Certaines galeries ont d’ailleurs bien compris ce rôle et viennent régulièrement s’y approvisionner en artistes qu’elles prennent ensuite en charge. Les journées portes ouvertes, organisées périodiquement par des groupements d’artistes, jouent un rôle similaire.

    Il n’en reste pas moins que les associations sont fragiles. Elles ne dépendent, pour la plupart, que de l’action de quelques-uns de leurs membres, alors que le pouvoir décisionnaire est dans les mains d’assemblées générales souvent constituées de personnes peu impliquées dans l’association mais, par principe, très critique vis-à-vis des actifs, sans pour autant proposer de solutions alternatives. Certaines de ces associations sont dépendantes de subventions publiques qui, en période de crise, se font plus rares, mettant parfois leur existence en péril. Enfin, la presse et les médias ne leur accordent aucune attention, alors que ce sont les véritables vitrines – et parfois les laboratoires – de la création contemporaine. Certaines ont des actions innovantes comme, par exemple, l’association Le pays où le ciel est toujours bleu d’Orléans, animée par Laurent Mazuy et Sébastien Pons, qui, bien avant le Centre Pompidou, a développé et mis en œuvre le concept d’une exposition mobile ; La Borne.

    Les budgets requis et l’importance des manifestations varient selon les associations. Par exemple, l’association MAC 2000, présidée par l’artiste plasticien Hervé Bourdin, organise la manifestation annuelle MACparis proposant, dans un cadre prestigieux, 125 expositions individuelles d’artistes sélectionnés parmi plus de 1 000 candidats et draine, chaque année, 15 000 visiteurs et acheteurs potentiels. Elle gère un budget annuel de l’ordre de 275 000 €, dont un peu plus d’un tiers provient de subventions. Il faut savoir que plus de 75 % de ses dépenses sont consacrées à la location et à l’aménagement de l’espace de la manifestation… Les subventions baissant, l’association doit faire évoluer son modèle. Elle peut augmenter le montant de la participation des exposants aux frais, ce qui entraînerait une forme d’anti-sélection en éliminant les plus jeunes, en début de carrière, qui n’ont pas les moyens de payer. Elle peut décider de se délocaliser, avec la certitude de perdre un grand nombre de son capital de visiteurs. Elle peut opter pour une réduction du nombre d’exposants à condition de pouvoir réduire ses frais fixes dans les mêmes proportions. Elle peut aussi se tourner vers d’autres mécènes…

    Autre exemple. L’association la Galerie du Haut-Pavé, fondée en 1953, a pour objectif d’organiser la première exposition parisienne de jeunes plasticiens. La liste des artistes ayant fait leur début dans cette galerie est impressionnante. Leur énumération constitue un résumé saisissant de l’art en France dans les soixante dernières années. Ceci étant dit, malgré ce palmarès enviable, aucun journal ni organe de presse ne lui a jamais consacré une seule ligne dans ses colonnes. Propriétaire de ses locaux, l’association fonctionne avec un budget annuel de 16 000 €, dont une subvention de 4 000 € de la Ville de Paris. La plupart des dépenses sont consacrées aux travaux d’impression des cartons d’invitation et à leur affranchissement postal. La dématérialisation de ces documents et le recours à Internet permettraient d’éliminer ces coûts. Dans le cas présent, la fragilité n’est donc pas tant financière que dans l’adhésion des membres de l’association à son projet. La plupart des cotisants ne règlent leur cotisation que par attachement à la mémoire du fondateur de l’association, le père Gilles Vallée o.p. Ils n’adhèrent plus aux choix esthétiques de la programmation, réalisée par un comité indépendant et jugée trop « contemporaine » par des personnes qui ne marquent, par ailleurs, que très peu d’intérêt pour la création artistique et dont les goûts sont restés figés à la modernité du temps de leur jeunesse. L’association n’arrivant pas à recruter de nouveaux adhérents, elle est condamnée à mourir par asphyxie ou à se faire le chantre d’un art révolu.

    Dernier exemple. L’association Acte de Naissance, créée en 1988 par Philippe Bétrancourt et Pascal Pesez, gère la galerie-atelier L’H du Siège, à Valenciennes. Ce lieu propose des ateliers d’artistes, offre des résidences pour des plasticiens créateurs, organise quatre expositions annuelles, souvent monographiques, et développe un important programme de médiation auprès des publics scolaires. La fin d’une subvention européenne, non renouvelée, ampute son budget et l’oblige à supprimer une de ses quatre expositions annuelles…

Les ventes aux enchères – le miroir aux alouettes
Pour être complet, il convient d’évoquer les ventes aux enchères parmi les moyens de diffusion de l’art contemporain.

    En France, les ventes aux enchères publiques d’art contemporain relèvent principalement du second marché. Elles constituent une source d’approvisionnement pour les acteurs de ce marché. Là aussi, les médias ne communiquent que sur les enchères astronomiques prononcées pour des œuvres historiques lors de vacations prestigieuses. Pour les autres créateurs contemporains, la réalité est toute autre. Leurs œuvres présentées en vente aux enchères proviennent de successions, de liquidations judiciaires ou de collectionneurs voulant se débarrasser de pièces qui ne les intéressent plus. Quand elles ne portent pas la signature d’un grand nom du panthéon contemporain, elles sont traitées mécaniquement, devant des salles parfois très clairsemées, et atteignent rarement des montants significatifs. Les collectionneurs, à condition d’être patients et de faire preuve de discernement, peuvent y faire des affaires. En revanche, l’aventure est moins gratifiante pour les artistes, car les enchères prononcées sur leurs œuvres sont accessibles via Internet et contribuent à la constitution de leur cote, une notion sans réelle signification mais à laquelle certains acheteurs sont très attachés.

    De temps à autre, un commissaire-priseur s’aventure dans le premier marché en organisant une vente d’œuvres en provenance d’ateliers d’artistes vivants. La vacation s’apparente alors à un bric-à-brac où les quelques œuvres de qualité, quand il y en a, ont du mal à émerger. Si l’artiste n’a pas prévu un prix de réserve, la déception peut être immense et l’effet sur la fameuse cote désastreux.

    De façon assez paradoxale, les ventes les plus valorisantes pour les artistes sont celles au profit d’œuvres humanitaires ou d’associations sans but lucratif. Les acheteurs y sont plus généreux. Les cotes sont donc poussées vers le haut, mais, malheureusement, dans ce cas, le produit de la vente ne revient pas aux artistes…

    Les ventes sur Internet, du type de celles organisées par eBay, peuvent constituer, pour des plasticiens, un bon moyen de diffusion de leur œuvre. Il faut cependant savoir que les enchères n’y sont jamais très élevées et que la bonne gestion d’un compte de vendeur prend du temps. Certains artistes, comme Philippe Martinery, Abdelkrim Tajiouti ou Michel Suret-Canale, ayant renoncé à s’attacher les services d’une galerie, en ont fait leur unique moyen de vente, avec des succès mitigés.

    Pour les acheteurs, le risque de déception est immense dès que l’on sort de ces ventes directes par les artistes. Les faux, en général grossiers, pullulent sur les sites de vente en ligne et aucune garantie n’est opposable aux vendeurs véreux.

Le mécénat d’entreprise – un vœu pieux
Devant le désengagement progressif de l’État des activités culturelles, et plus singulièrement de la création plastique, il reste le recours au mécénat d’entreprise. Malheureusement, la situation en France est différente de celle des pays anglo-saxons où les entreprises se glorifient de financer des activités culturelles, y compris dans le domaine de la création. La raison de cette différence est toujours la même. Il faut savoir que, pour l’immense majorité des entreprises, en France et partout dans le monde, les actions de mécénat sont d’abord et avant tout conçues pour leur personnel. Elles constituent un moyen de fédérer les employés, de les convaincre que leur entreprise est citoyenne, qu’elle sait s’ouvrir au reste du monde et contribuer à des causes apparemment gratuites et désintéressées.

    Si l’on exclut les salariés de quelques compagnies actives dans le domaine des produits de luxe ou visant une clientèle de haut de gamme à laquelle ils peuvent s’identifier, les employés des entreprises françaises sont au mieux indifférents à l’art contemporain, au pire hostiles. Des actions de mécénat dans ce secteur n’auraient donc pas l’effet fédérateur souhaité. Elles seraient immédiatement considérées comme la danseuse du patron, comme allant contre le bon sens et s’apparentant à du gaspillage, alors que tant de bonnes causes manquent cruellement de ressources. C’est pour cela que les entreprises s’orientent presque uniquement vers le mécénat caritatif ou écologique ou le financement de la recherche médicale, sujets plus consensuels et, partant, fédérateurs.

    Ici encore, la boucle est bouclée. Les choses ne changeront que lorsque la majorité des citoyens auront été convaincus du caractère indispensable de la création artistique et de son rôle bénéfique pour la société. Une fois de plus, la solution passe par la formation à l’histoire de l’art dès le plus jeune âge. Et, en attendant que les futures générations ainsi sensibilisées arrivent sur le marché du travail, par un important travail de médiation avec les citoyens, en commençant par les plus jeunes.

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* *
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Grand et vénérable chef.

    Voilà ce que je voulais vous dire sur l’état de l’art contemporain dans la tribu des Français. Vous comprendrez que la situation n’est pas brillante, même si quelques personnes, dont je suis, nourrissent encore l’espoir de voir les choses changer. Je crains bien que, très bientôt, il n’y ait pas plus d’artistes dans notre tribu qu’il n’y a de locuteurs de votre langue dans votre peuple. Ce serait dommage car, comme vous le savez, l’art est une composante importante de l’identité collective et individuelle, une source de plaisir, un moyen pour unir dans l’adversité, pour valoriser les différences et pour mieux vivre ensemble. C’est aussi le plus bel héritage que nous puissions offrir à nos enfants, aux enfants de nos enfants, et à leurs descendants jusqu’à la millième génération.

    C’est pourquoi, grand et vénérable chef, sur la base de votre expérience unique, j’aimerais recueillir votre très sage avis sur ce qu’il conviendrait de faire et sur les quelques propositions que j’ai osé formuler.

    En l’attente de vous lire, je reste votre très humble et dévoué admirateur.

Louis Doucet, wanda[18], janvier 2013




[*] Peuple et langue aborigènes d’Australie, au nord de la Nouvelle-Galles du Sud. En 1997, il n’y avait plus que trois locuteurs recensés de cette langue.

[1] « Je ne parle pas kamilaroi »… en kamilaroi.

[2] Certes, Chardin a bien été académicien, mais dans un genre secondaire et méprisé par l’Institution qui ne jurait alors que par la peinture historique, religieuse ou allégorique.

[3] À moins qu’il ne s’agisse de naïveté ou de niaiserie… De l’artiste ou du spectateur qu’il est censé séduire ou convaincre…

[4] Pis encore, puisque chez Rabelais, les moutons suivaient aveuglément un leader, fût-il manipulé. En l’occurrence, les moutons sont autogérés, mais vont bien tous dans la même direction.

[5] Il s’agit du rapport annuel publié par Artprice, basé sur les résultats obtenus en ventes aux enchères publiques.

[6] Ses contemporains désignaient son établissement sous le sobriquet de « rigolarium ». Il donna cependant naissance à une lignée de conservateurs qui marquèrent leur époque ; Jean Leymarie, Maurice Besset, Marie-Claude Beaud, Pierre Gaudibert, Serge Lemoine, pour n’en citer que quelques-uns.

[7] Un critique, qui eut son heure de gloire dans les années 1970 et 1980, s’est récemment vanté devant moi de rarement visiter l’atelier des artistes sur lesquels il écrivait.

[8] Maintenant dénommé LaM.

[9] Rappelons-nous que le tableau Les Demoiselles d’Avignon de Picasso, un des joyaux du MoMA de New York, n’a pas fait l’objet d’une préemption par l’État, après le décès de Jacques Doucet, en 1929.

[10] Le Musée national d’Art moderne n’a que cinq œuvres de Mondrian dans ses collections, dont trois de sa période constructiviste. Elles ont toutes été acquises – à prix fort – après 1974, alors que Mondrian a vécu et construit sa notoriété à Paris de 1912 à 1914, puis de 1917 à 1938…

[11] Herbert Vogel (1922-2012), employé au tri postal, gagnait, au sommet de sa carrière, 23 000 $ par an. Dorothy (née en 1935) gagnait à peine plus en tant que fonctionnaire bibliothécaire.

[12] En Allemagne, l’émergence tardive d’un État allemand, en 1870, et le dur passif du national-socialisme ont conduit à occulter l’enseignement de l’histoire traditionnelle (batailles, conquêtes, traités, frontières…) au profit d’un enseignement de la culture germanique – lettres, poésie, arts plastiques, musique, architecture… – dès le primaire et jusqu’au niveau de la fin des études secondaires. En Belgique, dont l’histoire, en tant qu’État, ne remonte qu’à 1848, le relatif manque d’événements historiques notables est compensé par une forte identification, à travers l’enseignement primaire et secondaire, dans l’art flamand et ses développements européens.

[13] Il ne s’agit, en l’occurrence, que de l’habituelle distinction entre le marché du neuf et celui de l’occasion, bien connu des concessionnaires automobile.

[14] La Galerie AL/MA est, en fait, une structure associative à vocation commerciale.

[15] Dans le cas présent, les galeries de province sont à la pointe, puisque Janos Ber, Dominique De Beir et Erwan Ballan sont défendus par la Galerie AL/MA de Montpellier, et que ces deux derniers artistes ainsi que Claude Briand-Picard et François Jeune le sont par Réjane Louin, à Locquirec.

[16] Si on l’estime, par exemple comme la différence entre le prix en galerie et celui obtenu en vente aux enchères. Les galeries prenant en général une marge, parfaitement justifiée, de 50 % du prix de vente, la moins-value est donc de 50 % dès le premier jour.

[17] L’attrait des niches fiscales est tel qu’un médecin de Romorantin-Lanthenay ou un épicier de Vesoul est prêt à investir quelques dizaines de milliers d’euros dans l’achat, aux Antilles, d’un bien immobilier qu’il ne verra jamais, dont il ne connaît ni la qualité ni la rentabilité, et encore moins la valeur marchande.

[18] Wanda veut dire homme blanc en langue kamilaroi.

Maude Maris
Maude Maris est une des artistes sélectionnées pour l’édition 2013 de L’Art dans les chapelles.
(voir l’annonce ci-dessous)







La peinture de Maude Maris procède par simplification et élimination du détail, par lissage, dit-elle. Partant d’images collectées sur Internet ou dans des catalogues d’équipements industriels, elle les assemble et les transforme, supprimant leurs détails, leurs aspérités pour n’en garder que la configuration essentielle. Ainsi épurées, ces formes n’ont plus d’échelle et peuvent indifféremment évoquer des monuments ou de menus objets qui pourraient tenir dans le creux de la main. Il s’agit donc d’un véritable processus de distanciation du sujet, à la manière dont Brecht usait dans son théâtre, mais aussi comme l’entendent les psychanalystes quand ils évoquent cette mise de soi-même à distance, dans un processus qui peut aller jusqu’à la déréalisation.

    Les images résultantes baignent dans un flux d’ambiguïtés. Ce sont de fausses maquettes d’objets improbables ou suspects, mais traités avec une perfection, un fini, un léché qui laissent deviner un modèle longuement observé, comme en témoigne le rendu sourcilleux de la perspective et des ombres, que n’auraient pas renié les peintres du Réalisme magique. Les espaces figurés peuvent être simultanément les pièces d’une demeure virtuellement habitable ou l’étroit espace d’un théâtre miniature comme ceux que Nicolas Poussin utilisait pour préparer ses compositions. À la charnière entre figuration et abstraction, ces constructions interpellent le spectateur sur l’essence de la peinture : murale ou de chevalet, cosa mentale ou représentation de réalités physiques ou incorporelles, métaphore ou vérité première, signification ou contemplation, chantier ou produit fini, décoration ou plaidoyer esthétique, microcosme ou macrocosme, stabilité ou déséquilibre, menace potentielle ou espace ludique… Autant de confrontations auxquelles le spectateur ne peut échapper, sauf à battre en retraite…

    Les couleurs tendres, nuancées et subtiles, le recours à la technique de la peinture à l’huile, le rendu quasi tactile des textures de certaines surfaces attestent d’une sensualité qui s’oppose de façon presque dialectique à l’apparente froideur de constructions déshumanisées et probablement inutiles. L’étrange et l’artificiel deviennent désirables, séduisants comme le chant de sirènes qui voudraient faire sombrer le spectateur dans un espace où l’absurde artificialité d’un monde dénaturé se pare des attraits de la grande tradition picturale. D’une certaine façon, Maude Maris détourne le concept de trompe-l’œil pour créer des trompe-tous-les-sens-et-l’esprit. Dans cet univers dont on ne sait situer les limites ni définir la matérialité, le Lewis Carroll, de De l’autre côté du miroir rejoint le Bachelard de La Poétique de l’espace et sa métapoétique.

    Dans ses dessins, et plus spécifiquement dans la série des Maisons noires, Maude Maris nous invite à sortir dehors et à observer ce que pourrait être le contenant des espaces figurés dans ses peintures. En première lecture, ces architectures rigoureuses empruntent aux blockhaus allemands en béton armé jalonnant la côte normande, aux architectures modernistes de Le Corbusier, aux modèles topologiques d’Escher et aux Prisons piranésiennes. Pour utiliser la terminologie de Deleuze analysant Foucault, on assiste ici au passage de la subjectivation des plissements ou du dedans de la pensée vers une pensée du dehors[1], du savoir au pouvoir.

    La première question qui vient à l’esprit est celle de l’habitabilité de telles structures. La disposition des ouvertures, la confusion des niveaux, la compacité des volumes labyrinthiques, l’apparente unicité du matériau, l’absence de toiture, l’interchangeabilité du haut et du bas, de la droite et de la gauche poussent rapidement à conclure à l’artificialité de ces demeures en forme de mausolées. Il s’agit donc, ici, d’une remise en cause du caractère utilitaire des maisons qui deviennent monuments, lieux de mémoire, reliquaires des fantasmes et des interdits de notre société.

Louis Doucet, janvier 2012




[1] « Penser ne dépend pas d’une belle intériorité qui réunirait le visible et l’énonçable, mais se fait sous l’intrusion d’un dehors qui creuse l’intervalle, et force, démembre l’intérieur », in Foucault, éditions de Minuit, 1986.

Laurence Papouin
– Fleur de peau, fleur de toile

Laurence Papouin est une des artistes sélectionnées pour l’exposition De la peinture, dans tous les sens… et à tous les étages !
au centre d’art de Kerguéhennec du 17 mars au 2 juin.
(voir l’annonce ci-dessous)











« La peinture est à fleur de toile,
la vie n’est qu’à fleur de peau. »
Eugène Fromentin, in Les Maîtres d’autrefois

Du pot à la peau… Telle est la démarche de Laurence Papouin. Revendiquées comme peintures, ses œuvres se présentent au spectateur comme une peau de peinture acrylique, épaisse, plissée, accrochée au mur ou posée au sol, soumise aux lois de la gravité, un scalp, une dépouille ou une mue. Ses productions les plus récentes évoquent un mouvement qui aurait été pétrifié – plastifié, devrait-on dire –, à la façon dont le Bernin et les baroques italiens figeaient le mouvement, le jeu de plis et de drapés fluides, dans une éternité de pierre. Au risque de contredire Fromentin, les peintures de Laurence Papouin, ses toiles, ont de l’épaisseur. Elles se comportent, d’une certaine façon, en métaphore du célèbre propos de Valery.[1] Leur épaisseur leur confère une matérialité qui renoue avec une longue et ancienne tradition picturale, celle des figurations des supplices de Marsyas ou de saint Barthélemy.

    Le sentiment d’horreur et l’anecdotique en moins… Car les peintures de Laurence Papouin ne racontent pas. Elles se situent dans le registre de l’énonciation, du prédicat, du discours sur la peinture en tant que soi. Une sorte de tentative de (re)définition ontologique de l’objet peinture, renouvelant et actualisant, en ce début de XXIe siècle, le propos tenu par Maurice Denis plus d’un siècle auparavant.[2] L’artiste se positionne peut-être aussi en émule d’Artaud – « C’est par la peau qu’on fera rentrer la métaphysique dans les esprits. »[3] – ou de Barthes – « Le langage est une peau : je frotte mon langage contre l’autre. »[4]

    Affirmations concomitantes de la mort duchampienne de la peinture et de sa résurrection, les peintures de Laurence Papouin concrétisent et contredisent, dans un même geste pictural, la vision de Duchamp sur l’inframince : « Je pense qu’au travers de l’inframince, il est possible d’aller de la seconde à la troisième dimension. »[5] Plus tout à fait peintures et pas encore sculptures, les productions de Laurence Papouin s’installent donc dans un entre-deux conceptuel qui subvertit et prend à contre-pied tous les discours académiques ou théoriques sur la peinture, son rôle et son devenir. Plus de dictature du sujet… Éliminée la dialectique entre fond et forme… Dépassée l’opposition entre support et matière… Tout est dans le paraître, dans la surface, dans l’apparence ou, plus précisément, dans l’apparition, la manifestation, comme une épiphanie[6] du concept peinture, dans le sens que Maritain donnait de ce terme : « L’action est une épiphanie de l’être ».[7]

    Le propos de Laurence Papouin relève d’une démarche distanciée – au sens brechtien de ce terme – de l’acte de peindre. L’artiste rejette tout sentimentalisme, toute prétention à une quelconque universalité. Son discours est simple et se réduit à une assertion primaire : « ceci est de la peinture. » À comprendre dans les deux sens de ce prédicat : il s’agit de matière peinture solidifiée, mais aussi d’une peinture dans le sens où on l’entend quand on parle, par exemple, de peinture de chevalet… ou de peinture en bâtiment… La peinture de Laurence Papouin investit donc un triple registre : elle est à la fois subjectile, matière qui le recouvre et produit fini. Ceci ne l’empêche pas de mobiliser, chez le spectateur, plusieurs de ses sens : vue, toucher, odorat… Il s’agit de bien affirmer que la peinture acrylique qui constitue les peaux n’est qu’une matière plastique comme une autre, stockée dans un pot avant de devenir peau.

    Les motifs utilisés sont délibérément neutres et banals, empruntés au répertoire des objets les plus fonctionnels : torchons, serviettes, mouchoirs, toile cirée… tout droit sortis du catalogue d’un tisserand du Choletais. Impression accentuée par le recours à des porte-serviettes du commerce pour présenter certaines pièces, telle sa Peinture suspendue verte, de 2009. Non sans humour, Laurence Papouin ravale la radicalité d’un Mondrian ou des artistes du pop-art à la trivialité de la décoration domestique la plus utilitaire. Les clichés surannés d’intérieurs domestiques idéaux, les images des produits d’une industrie de masse, les valeurs fugaces d’une société de consommation envahissante, les slogans éculés des mass-media, le clinquant et le superficiel du bling-bling se télescopent, s’opposent et se heurtent à une pratique lente, quasi artisanale, dont la gratuité désintéressée ne devient que plus criante et dérisoire. Plus récemment, Laurence Papouin s’abstrait petit à petit du motif pour s’épancher – sans lyrisme, cependant – dans une bichromie ou une monochromie plus radicale, dans des effets de transparence.

    Laurence Papouin a fait sien ce que le prophète Jérémie clamait déjà six siècles avant notre ère : « Un Éthiopien peut-il changer de peau ? Une panthère de pelage ? »[8] Non, bien sûr… Alors à quoi bon tenter prétendre le contraire, vouloir donner l’illusion de ce qui n’est pas, de ce qui ne peut pas être ? Les peaux de Laurence Papouin n’ont aucune velléité de transformation, de déguisement, de travestissement. Elles sont… Un point, c’est tout... L’épreuve proposée au spectateur consiste donc plutôt à pénétrer mentalement la peau pour découvrir ce qui se passe sous la surface de ce derme trivial, patiemment constitué par l’industrie de l’artiste. Je suis prêt à gager qu’il y trouvera une multitude d’autres personnages, faisant écho au propos de Michaux : « On n’est pas seul dans sa peau. »[9] Mais peut-être aussi, faut-il en revenir à la réflexion désabusée de Nietzsche : « La terre a une peau et cette peau a des maladies ; une de ces maladies s’appelle l’Homme. »[10] La peinture de Laurence Papouin, au-delà de son apparente banalité, reste celle de tous les possibles

Louis Doucet, janvier 2012




[1] « Ce qu’il y a de plus profond en l’homme, c’est la peau En tant qu’il se connaît. […] Et puis moelle, cerveau, tout ce qu’il faut pour sentir, pâtir, penser… être profond, ce sont des inventions de la peau !», in L’Idée fixe.
[2] « Se rappeler qu’un tableau, avant d’être un cheval de bataille, une femme nue ou une quelconque anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées. », in revue Art et Critique, 30 août 1890.
[3] In Le Théâtre et son double.
[4] In Fragments d’un discours amoureux.
[5] In Notes.
[6] Au sens étymologique de ce terme : manifestation d’une réalité cachée.
[7] In Humanisme intégral.
[8] Jérémie 13:23.
[9] In Qui je fus.
[10] In Fragments posthumes.

Quelques acquisitions récentes




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PANTIN
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Régis Sénèque –
Un peu de temps, de matière et de silence #2

Du 22 mars au 14 avril 2013
Oulan Bator – 20 rue des Curés – 45000 ORLÉANS


Cristine Guinamand;
Hospitalité au désordre

Du 23 mars au 21 avril 2013
APONIA – 6 avenue Montrichard – 94350 VILLIERS-SUR-MARNE


Élissa Marchal – Assemblages
Du 16 avril au 25 mai 2013
Galerie du Haut-Pavé – 3 quai de Montebello – 75005 PARIS


ajustement(s)-ré-ajustement
Du 8 au 29 juillet 2013
Galerie Scrawitch – 6bis cité de l’Ameublement – 75011 PARIS
Valérie Blin-Kaddour • Marion Jannot • Flavie Cournil • Régis Sénéque


Domaine de Kerguéhennec
Domaine de Kerguéhennec – 56500 BIGNAN
Du 17 mars au 2 juin 2013

De la peinture, dans tous les sens…
et à tous les étages !

Erwan Ballan • Frédéric Bouffandeau • Élodie Boutry • Claude Briand-Picard • Bernard Cousinier • Nicolas Guiet • Laurence Papouin • Édouard Prulhière • Sylvie Turpin

Arnaud Vasseux – Continuum, murmure

Les dessins de Tal Coat. 1926-1940


Du 30 juin au 29 septembre

François Dilasser – L’Atelier (1972 - 2007)


L’Art dans les chapelles
Du 5 juillet au 15 septembre 2013
Pays de Pontivy
Juillet et août – ouvert tous les jours de 14h à 19h – fermé le mardi
Septembre – ouvert les trois premiers week-ends (samedi et dimanche) de 14h à 19h.
Entrée libre et gratuite – un guide vous accueille dans chaque chapelle.
Accueil et départ des circuits :
     Maison du Chapelain
     lieu dit Saint-Nicodème
     56930 PLUMÉLIAU

Inauguration en présence des artistes les 5, 6 & 7 juillet
Laurette Atrux-Tallau • Virginie Barré • Yves Chaudouët • Anne Deguelle • Nathalie Elemento • Mounir Fatmi • Sarah Fauguet et Bernard Cousinard • Lizan Freijsen • Pierre Labat • Gauthier Leroy • Saverio Lucariello • Maude Maris • Guillaume Millet • Philippe Million • Baptiste Roux • Sylvie Ruaulx • Edouard Sautai • Société réaliste • Daniel Tostivint


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